[ VIDEO ]Shamshir Mukoon, Ag GM du CEB: « La demande d’électricité a dépassé nos prévisions par 3, 7 MW »

L’Acting General Manager du CEB est catégorique. L’augmentation sur les factures d’électricité pour les deux derniers mois est directement liée à la hausse du mercure. D’ailleurs, dit Shamshir Mukoon en guise d’explications, le CEB avait prévu que la demande d’électricité durant cette période serait de 488 MW alors qu’il a dû fournir  491, 7 MW au final. L’installation des nouveaux compteurs n’est pas aussi étrangère à l’augmentation des factures d’électricité. Ceux-ci étant plus précis, ils permettent d’enregistrer la moindre utilisation contrairement aux anciens compteurs. Shamshir Mukoon revient également sur le projet de turbine à gaz qui, soutient-il, n’avait fait l’objet d’aucune contestation auparavant.

 

Q : De nombreux abonnés du CEB protestent contre la hausse excessive de leurs factures d’électricité durant ces deux derniers mois. Comment l’expliquez-vous ?

J’ai vu le nombre d’abonnés qui se plaignent sur les réseaux sociaux. Mais il y a une explication simple à cela. Le « pattern » de la consommation d’électricité varie tout au long de l’année en fonction des conditions climatiques. Automatiquement, la consommation d’électricité est supérieure en été qu’en hiver. Il ne faut pas oublier que cette année, la température a été plus élevée que d’habitude, soit par 2 degrés. Ce qui implique que les réfrigérateurs et les climatiseurs utilisent plus d’électricité pour maintenir la fraîcheur. D’ailleurs, il y avait même une rupture d’offre de climatiseurs et de ventilateurs sur le marché en décembre. Ce qui confirme qu’il y a eu une surutilisation de l’électricité.

Maintenant si quelqu’un pense qu’il y a une anomalie sur sa facture, il peut enregistrer une plainte en suivant la procédure. Le CEB installera ainsi un compteur calibré chez lui pour une vérification qui s’étale sur un à deux mois. Si une anomalie est effectivement détectée, le client sera remboursé. Au cas contraire, il devra passer à la caisse. C’est triste de voir qu’il y a une espèce de contagion virale sur le net. Dès que quelqu’un se plaint d’une hausse, tout le monde s’y met aussi. Mais moi, je me fie aux statistiques, plus précisément la quantité d’électricité qu’on a produit et qu’on a vendu, pour soutenir mes arguments.

 

Q : Pouvez-vous partager ces chiffres avec nous ?

Ce sont des chiffres internes au CEB. Ils sont toutefois publiés dans le rapport annuel du Bureau des Statistiques.

 

Q : Mais en se basant sur ces statistiques, y a-t-il eu une hausse de la consommation d’électricité ?

Effectivement !  On prévoit, chaque année, une hausse qui oscille entre 2.5% à 3%. On avait prévu que la demande d’électricité pour cette année soit de 488 megawatts (MW). Finalement, on en a enregistré 491, 7 MW, soit 3, 7 MW supérieur à nos prévisions. Ce qui confirme la surutilisation de l’électricité liée à une hausse de la température.

 

Q : Certains abonnés soutiennent que les factures ont accusé une hausse depuis l’installation des nouveaux compteurs. Qu’en est-il au juste ?

Pas nécessairement. Auparavant, on avait des compteurs électromécaniques alors que les nouveaux sont électroniques. Il y a donc eu un changement dans la façon dont l’électricité est comptabilisée. La classe de précision pour les compteurs électromécaniques est plus ou moins de 2% alors que pour les nouveaux, elle est approximativement de 1%. Ce qui veut dire que les compteurs électriques sont plus précis…

 

Q : … En d’autres mots, ils ont une incidence sur les factures ?

Du moment que c’est plus précis, on arrive maintenant à comptabiliser la moindre utilisation. Le CEB en sort donc gagnant. Mais ce n’est pas uniquement cet élément qui a fait grimper les factures en décembre ou en janvier. Le plus grand facteur demeure la température. Il suffit d’une utilisation plus judicieuse de l’électricité pour que les factures ne grimpent pas.

 

Q : Vous avez fait état d’une hausse du taux de consommation qui est supérieure à vos prévisions. Est-ce que le CEB a les moyens de répondre à la demande grandissante d’électricité ?

Bien sûr. Nous avons une planification à long terme en ce qu’il s’agit de notre projection énergétique. En nous basant sur l’« Integrated Electricity Plan », on peut déjà faire des prévisions des besoins énergétiques pour les dix prochaines années. C’est en se basant dessus que nous travaillons pour mettre en place des centrales. C’est ainsi que nous avons mis sur pied la centrale de Saint-Louis à Camp Chapelon. D’ailleurs, elle avait fait l’objet de beaucoup de bruit mais aujourd’hui elle opère sans problème. Nous avions la responsabilité de le faire afin de pallier à la demande énergétique. Nous avons aussi mis des projets solaires en opération, notamment le « Home Solar Project ». Mais bien entendu, nous avons aussi besoin de centrale. Voyez-vous, le projet de Metro Express, c’est joli. Mais il faut que nous l’approvisionnions en électricité ! Nous devons aussi alimenter tous ces nouveaux bâtiments que vous voyez surgir à travers le pays, les « smart cities », etc. D’où l’importance de mettre sur pied une centrale électrique.

 

Q : Il paraît que le CEB ira de l’avant avec le projet de turbine à gaz en dépit des réticences qu’il y en a autour. Etes-vous confiant de la viabilité du projet ?

Je dois souligner que c’est un projet qui date depuis trois ans. Il a été approuvé par le Consultant de l’EDF, recommandé par la Banque Mondiale et a fait l’objet d’études de faisabilité technique. C’est ce qui pousse le CEB à aller de l’avant avec le projet. Cette centrale opérera à partir du diesel mais aussi avec le gaz naturel. On parle de plus en plus d’environnement vert. On ne veut pas de charbon à Maurice. Raison pour laquelle le projet CT Power n’est plus là. Mais si on veut remplacer la production dite sale par une qui est propre, il y a bien un prix à payer ! Cela dépend de ce qu’on veut. Ce n’est pas une question de viabilité par rapport aux chiffres, mais elle dépend aussi de notre politique environnementale. Si économiquement, on estime qu’il n’y a pas suffisamment d’argent pour le concrétiser … (ndlr : haussant les épaules) Il faut bien décider ce qu’on veut faire.

 

Q : Où trouverez-vous les fonds nécessaires pour son implémentation ?

Nous avons une planification pour son financement. À titre d’exemple, le projet de Saint-Louis avait coûté Rs 4, 2 milliards, mais la question de financement n’avait jamais été évoquée. En ce qu’il s’agit du projet de turbine à gaz, son financement a déjà été planifié.

 

Q : Mais le ministère des Finances n’avait pas imposé de conditions par rapport aux prêts pour le financement de la centrale de Saint-Louis tandis qu’il l’a fait pour celle-ci !

Il faut bien différencier les choses. Pour la centrale de Saint-Louis, on avait obtenu un prêt de l’African Development Bank après le feu vert du ministère des Finances. Nous suivrons les mêmes procédures pour le présent projet. Je n’y vois aucun problème. Au CEB, nous avons les fonds nécessaires pour financer une partie du projet et nous avons plusieurs options pour financer le reste. Il s’agit là du côté technique de son implémentation.

Maintenant, qui est pour le projet et qui est contre, cela relève d’un autre débat. Nous ferons ce qu’il y a à faire. Nous avions lancé un appel d’offres en passant par le « Central Procurement Board » (CPB) qui tombe sous l’égide du ministère des Finances. Nous avions déjà alloué le projet en nous basant sur la recommandation faite par le CPB, mais il y a eu entretemps des contestations. Ce qui est tout à fait légitime. L’« Independent Review Panel » (IRP) a recommandé une réévaluation. Ce qui est en train d’être fait. Donc, les procédures sont suivies normalement.

 

Q : Et si jamais le ministère des Finances refuse de donner son aval pour que le CEB contracte un prêt, que fera le CEB ?

S’il y a une telle objection, je le ferai part au board du CEB et ce sera alors à lui de trancher.

 

Q : Ne craignez-vous pas que ce projet termine comme celui du CT Power ?

On avait travaillé sur le projet CT Power pendant plusieurs années, le coût étant moindre pour le CEB. Cependant, c’est le gouvernement qui décide de la politique énergétique du pays. Politiquement, ce projet ne cadrait pas avec la vision gouvernementale. Quant au projet de turbine à gaz, cela fait maintenant trois ans depuis qu’on y travaille et il n’y avait pas eu d’objections auparavant.