Tremblement au Sun Trust : Nando Bodha inflige une claque cinglante à Pravind Jugnauth

« Nando Bodha pas pou allé. Aussi longtemps ki Soodhun là, nando Bodha pas pou aller ». C’est ce qu’avait affirmé Showkutally Soodhun au cours d’une fonction en milieu de semaine. Il ne semblait pas être le seul à croire que le ministre des Affaires étrangères, un fidèle de longue date du MSM, allait abandonner la barque gouvernementale en dépit du tourbillon politique dans lequel se trouve le gouvernement depuis quelque temps. L’Attorney General Maneesh Gobin était tout aussi convaincu, vendredi, que Nando Bodha ne désertera pas le Sun Trust. Une rassurance qui avait été jugée nécessaire après l’annonce du leader de l’Opposition Arvin Boolell, mardi, que « Bodha has conveyed the message that he would quit ».

« Allez mo gueter la si Nando pe quitter. Demain mo invite tou nou partisans dans comité central 2h à Port-Louis. Nou écoute Nando », avait-il soutenu, l’air amusé, sur les ondes de Radio Plus. Mais comme cela avait été le cas la dernière fois qu’il était sur le plateau de cette radio, plus précisément quand il avait ironisé que le MSM « pane arrive même niveau » que le PTr en termes de nominations avant que la nomination de son père Vishwadeo Gobin au MGI et au RTI ne soit annoncée le lendemain, Maneesh Gobin est une fois de plus allé trop vite en besogne.

Ainsi, bien avant que ne sonnent les 14h, Nando Bodha, avait déjà annoncé sa démission du gouvernement, mais aussi de toutes les instances du MSM où il assumait le rôle de secrétaire général. Il a, dans la foulée, pris à contre-pied son ancien parti qui visait justement à faire une démonstration de force en guise de riposte face à la cascade de dénonciations des avocats dits Avengers et à la marche de l’Opposition prévue pour le samedi 13 février 2021. Une démission qui, bien que certains, surtout les nouveaux adhérents du parti, tentent de minimiser, a secoué le Sun Trust et confirme le malaise qui s’y est installé. D’autant que personne ne peut nier que Nando Bodha, issu de la vieille garde du MSM et proche collaborateur de sir Anerood Jugnauth, était l’un des piliers qu’il restait au MSM.

Nando Bodha faisait partie du clan de Jugnauth père. Ce qui l’excluait automatiquement de Lakwizine qui tire les ficelles dans l’ombre. Écarté et écœuré par la situation chaotique dans laquelle se trouve le pays et sur laquelle le Premier ministre semble fermer les yeux, Bodha a préféré claquer la porte du parti sans tambour ni trompette, mais en prenant le soin d’expliquer sa décision dans un communiqué de presse.

Nando Bodha : « Les idéaux et principes fondamentaux […] ne sont plus là »

Il se montre inquiet de la situation « extrêmement grave » qui règne dans le pays. Nando Bodha explique, dans un communiqué de presse émis hier matin pour annoncer sa démission comme ministre et membre du MSM, que « la culture du pouvoir et le fonctionnement du MSM ne correspondent plus aux valeurs et principes qui ont toujours marqué mon parcours politique. Les idéaux et principes fondamentaux qui m’ont guidé depuis mon engagement avec sir Anerood Jugnauth ne sont plus là. À ma grande déception ».

L’ancien ministre des Affaires étrangères avoue avoir fait part de ses réserves, sans doute aux plus hautes sphères du gouvernement et du parti, tout en proposant des « propositions constructives », mais en vain. Nando Bodha annonce qu’il se consacrera dorénavant à un nouveau combat qui tournera autour d’un nouveau projet de société qui correspondrait aux aspirations des Mauriciens.

Pravind Jugnauth entouré, mais néanmoins esseulé, acculé et affaibli

Il a beau tenté de garder le sourire, de se faire prendre en photo entouré des membres de son parti, se laisser consoler par les acclamations des quelques centaines des partisans venus des quatre coins de l’île pour lui témoigner leur soutien aux sons de pétarades, mais il est quand même trahi par sa mine déconfite et son visage crispé. Intervenant lors du comité central élargi du MSM au Sun Trust hier, il a jugé nécessaire de retracer son parcours politique et de réitérer ses prétendus exploits dans un exercice de « tappe l’estomac ». Il ne s’est par contre pas attardé sur la démission de Nando Bodha, sauf qu’il aurait été appâté par Paul Bérenger pour occuper le fauteuil de Premier ministre. Histoire de minimiser cet événement politique qui vaut son pesant d’or.

Face à cette démission, et d’autres qui vont peut-être suivre, ainsi que les allégations qui s’accumulent contre lui personnellement et contre son colistier Yogida Sawmynaden, Pravind Jugnauth se retrouve de plus en plus esseulé, d’autant qu’il ne peut plus compter sur le soutien des anciens du parti qui voient d’un mauvais œil l’accaparement du Sun Trust et du PMO par les membres de Lakwizinn. Les regards seront braqués sur lui dans les jours qui viennent pour voir quelles stratégies il va adopter pour pouvoir remonter, si c’est encore possible, la pente…

Postes ministériels à pourvoir

Nando Bodha a laissé derrière lui un poste ministériel vacant. Qui sera appelé à occuper ce fauteuil ? Pour l’instant, c’est à Alan Ganoo que cette responsabilité a été confiée. Selon nos informations toutefois, Pravind Jugnauth envisagerait de procéder prochainement à un remaniement ministériel. Cet exercice sera d’ailleurs rendu nécessaire au cas où Yogida Sawmynaden est contraint à la démission. Depuis hier, la machinerie de Lakwisinn a été mise en marche et une opération de séduction et de débauchage aurait déjà été lancée pour amadouer certains élus récalcitrants, mais aussi pour attirer d’éventuels transfuges dans les rangs du gouvernement. Pravind Jugnauth réussira-t-il son coup ou devra-t-il en amortir d’autres coups bas ?