Taux excessivement élevé de manganèse dans l’essence : La STC au pied du mur

  • Les dommages irréversibles, selon la MVDA qui exige des indemnités

Avait-t-il réagi à la va-vite sans vraiment connaître les faits ou tentait-il de berner la population ? Toujours est-il que le ministre du Commerce et de la protection des consommateurs, Yogida Sawmynaden, a commis un faux-pas en balayant d’un revers de la main les avertissements répétés de l’opposition sur la qualité de l’essence. Il avait même accusé Xavier Duval de vouloir créer un psychose et d’en tirer un capital politique. Or, il est maintenant prouvé que la State Trading Corporation (STC) a clairement fauté, surtout au niveau du contrôle technique. Si celui-ci avait été effectué comme il se doit, il est évident que la cargaison de carburants contaminés n’aurait jamais été livrée sur le marché mauricien au préjudice de ces 3 300 propriétaires qui ont eu des problèmes avec leurs véhicules. Sans compter que les conséquences auraient pu être beaucoup plus désastreuses, sachant que le taux de manganèse autorisé n’est que de 2 mg par litre alors que cette cargaison particulière en contenait … 24 mg/l à 129 mg/l !

Si le ministre Sawmynaden s’était montré plus attentif aux divers avertissements de l’opposition et des concessionnaires au lieu de se montrer arrogant, l’on aurait pu prévenir cette nouvelle polémique et prendre des mesures de précaution dès octobre. D’ailleurs, on ne sait toujours pas quels sont les résultats des tests qu’ils avaient commandés à l’étranger. Les autorités compétentes ont-elles failli à leur tâche ? C’est dans l’intérêt de la nation qu’une enquête soit instituée sur toute l’affaire pour situer les responsabilités – ou irresponsabilités – avant que des sanctions ne soient prises. Car se retrouvant au pied du mur, la STC devra tôt ou tard trouver un consensus pour rembourser ou indemniser les Rs 150 millions qu’ont coûté les réparations des 3 300 véhicules affectés.

Le président de la Motor Vehicles Dealers  Association (MVDA), Ravi Issur, n’a pu rester insensible face aux résultats des tests effectués sur les carburants obtenus à Maurice. Il a dénoncé le fait qu’un taux élevé de manganèse est présent dans l’essence et que bon nombre de véhicules a connu des dégâts aux moteurs.

En effet, depuis 2010, l’essence importée par la State Trading Corporation (STC) ne contenait pas de manganèse, jusqu’à ce qu’un faible taux a été autorisé en 2014. Depuis, le taux maximal accepté de manganèse dans l’essence est de 2 mg/l. Cela a pour but de parer à l’éventualité d’une exposition non-intentionnelle de la cargaison à des additifs métalliques. « D’ailleurs, dans son appel d’offres émis le 25 mars 2019, pour la période du 1er août 2019 au 31 juillet 2020, la STC avait réitéré cette spécification », déclare Ravi Issur.

 Taux excessivement élevé

Cependant, vu le nombre grandissant des véhicules affectés et de la gravité des dégâts observés, les membres de la MVDA ont commandité des tests auprès des laboratoires locaux et étrangers. Le résultat est choquant : nos carburants contenaient un taux de manganèse variant entre 24 mg/l et 129 mg/l alors que seulement 2 mg/l est autorisé !

Ravi Issur monte ainsi au créneau et réclame aux autorités d’assurer que le carburant ne contienne plus de manganèse. Il va plus loin pour affirmer que « Chaque automobiliste doit savoir que son véhicule, quel que soit son âge ou sa marque, sera affecté tôt ou tard, s’il ne l’est pas encore. » La MVDA demande ainsi qu’une solution adéquate soit trouvée pour les propriétaires ainsi que pour les concessionnaires.

Notre interlocuteur s’est aussi attardé sur le fait que les constructeurs automobiles et les importateurs officiels de véhicules neufs se sont, de leur côté, toujours alignés sur les spécifications nationales, telles qu’établies par la STC, pour proposer des véhicules adaptés au marché mauricien. De ce fait, seule une non-conformité avec les exigences de la STC peut être la cause de ce problème. « C’est clair pour nous que le manganèse n’aurait pas dû être présent dans l’essence en octobre 2019 », a-t-il souligné.

La situation est revenue à la normale en janvier

Cependant, ce dernier a tenu à rassurer les automobilistes que les analyses réalisées en janvier 2020 sur plusieurs échantillons ont révélé que la situation est revenue à la normale. « Nous sommes très soulagés, vu que maintenant l’essence ne contient plus de manganèse mais le mal a été fait. C’est irréversible. Beaucoup de véhicules sont déjà affectés par ces carburants de ces derniers mois sur le marché. » Ravi Issur espère ainsi que d’autres cargaisons contaminées ne débarquent plus sur le marché. Il estime qu’une loi devrait être adoptée pour interdire la présence de manganèse dans l’essence.

De ce fait, il demande que les personnes ayant encouru des dépenses soient remboursées. « Depuis novembre 2019, les concessionnaires sont intervenus sur plus de 3 300 véhicules dont les moteurs ont été affectés. L’association demande aux autorités que les propriétaires de véhicules endommagés soient indemnisés pour les dépenses encourues. La MVDA chiffre les pertes à plus de Rs 150 millions à la fois pour les concessionnaires et les clients commercialisés chez nous. », dit Ravi Issur.

Le manganèse affecte la performance et la durabilité des véhicules

Le méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT) est un additif pour l’essence augmentant l’octane qui est utilisé depuis plus de 50 ans. Cette utilisation a été controversée; en particulier dans les véhicules à essence modernes équipés de systèmes avancés de contrôle des émissions. Il est à craindre que l’utilisation prolongée du MMT conduise à l’accumulation de dépôts contenant du Mn sur les composants du moteur et du système d’émissions, affectant ainsi négativement les performances et la durabilité des émissions des véhicules.

De nombreux programmes d’essais ont été menés, y compris une large gamme d’années-modèles de véhicules, de types de technologies et de conditions d’essai. En général, les études des constructeurs automobiles ont conclu que dans certaines conditions d’essai, l’utilisation du MMT est préjudiciable; contribuant au colmatage des convertisseurs monolithiques situés à proximité du collecteur d’échappement, l’obturation partielle d’un convertisseur de billes sous le plancher; une augmentation des émissions d’hydrocarbures des moteurs; et dépôts excessifs de bougies.