Sangeet Fowdar, membre du Muvman Liberater : « Rien ne peut empêcher Navin Ramgoolam de refaire surface »

Le membre du Muvman Liberater ( ML) persiste et signe. Dans l’interview qu’il a bienveillamment accordée au Sunday Times, notre invité de la semaine maintient qu’il est toujours membre du ML  aussi longtemps qu’il ne reçoit pas un communiqué du parti précisant son expulsion. D’autre part, il laisse entendre que le gouvernement de l’Alliance Lepep ira au bout de son mandat. « Dehors le temps pas bon. Zotte préfèrent reste dans la caze », dira-t-il. Commentant l’affaire Lutchmeenaraidoo-SBM, il a affirmé que dans un  autre pays, on aurait tout de suite révoqué  le patron de la banque ».

Sanjay BIJLOLL

 

Q : Sangeet Fowdar, vous n’êtes pas un novice en politique ; ancien élu du MMM, ancien ministre, vous rejoignez votre ancien camarade, Ivan Collendavelloo au Muvman Liberater, rien ne prédisait que vous alliez vous séparer. Que s’est-il donc passé entre vous ?

R : Valeur du jour, je me considère toujours comme membre du Muvman Liberater car jusqu’ici je n’ai reçu aucune lettre ou communiqué, précisant que la direction du parti m’a expulsé. Je n’ai commis aucune faute. Tout simplement, j’ai exprimé la voix du peuple, c’est-à-dire tout ce que la population ressent actuellement dans le pays.

 

Q : Que comptez-vous faire, maintenant, siéger en indépendant à la prochaine rentrée parlementaire ou rejoindre l’opposition ?

R : We will cross the bridge when we will come to it. D’ailleurs, mes amis faisant partie du ML n’approuvent pas l’idée d’une expulsion.

 

Q : A un certain moment, on vous disait proche du PMSD, après que XLD a été l’invité d’honneur d’une organisation socioculturelle dans votre circonscription. Comment réagissez-vous ?

R : Je suis en bons termes – et aussi proche –  avec les leaders politiques de l’Alliance Lepep. J’ai aussi des relations civilisées avec les partis d’opposition. J’ai été invité à cette fonction de l’Arya Sabha, qui se trouve dans ma circonscription, en tant que député du no 6 et XLD était l’invité d’honneur.

 

Q : Dites-nous sincèrement. M. Fowdar : si vous étiez nommé ministre du gouvernement de l’Alliance Lepep, est-ce que vous auriez critiqué le ML et le gouvernement ?

R : J’aurais pu répondre à votre question si j’étais ministre. Cependant, je vous dirais que c’est mon devoir de tirer la sonnette d’alarme peu importe que je sois député, PPS ou ministre.

Toutefois, je vous dirais qu’à Maurice nous avons un problème. Un député doit fermer sa bouche s’il est député. Il ne peut s’exprimer librement ou dire grand-chose car les instances gouvernementales ainsi que la population lui accordent peu de valeur. C’est le conseil des ministres qui décide de tout. Cela dit, je dois préciser que lors de la réunion des groupes parlementaires, j’ai soulevé beaucoup de points concernant les actions gouvernementales. J’ai exprimé mon désaccord là où il le fallait.

J’ajouterais que le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, prône la démocratie. Il vous donne l’occasion de vous exprimer et de participer aux débats.

 

Q : Pensez-vous que dans la mesure où il a été ‘demoted’, Vishnu Lutchmeenaraidoo aurait dû démissionner du MSM et comme député ?

R : Vous auriez dû poser cette question à  l’ancien ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo. Ce dernier était pressenti non seulement comme ministre des Finances, mais aussi  comme l’architecte  du deuxième miracle économique. Je ne sais pas ce qui s’est réellement passé. Donc je préfère ne pas commenter davantage.

 

Q : Pensez-vous qu’avec l’affaire Lutchmeenaraidoo le gouvernement s’est retrouvé fragilisé ?

R : Evidemment, le gouvernement s’est retrouvé fragilisé. Certes, l’affaire Lutchmeenaraidoo a créé un impact important dans les milieux politiques et aussi au sein de la population. La population se demande pourquoi Vishnu Lutchmeenaraidoo qui occupait le portefeuille de ministre des Finances est relégué au second plan. Le peuple avait voté  ce dernier  pour qu’il redresse l’économie du pays. Or, les Mauriciens sont restés sur leur faim.

 

Q : L’ancien Premier ministre, Dr Navin Ramgoolam, aurait la chance d’être élu si une élection partielle devait avoir lieu au no 7 Piton/ Rivière-du-Rempart). Quels sont vos commentaires à ce sujet ?

R : Peut-être que oui, peut-être que non. Il n’y a aucune certitude qu’il pourrait gagner les élections. Toutefois, je dois vous dire qu’actuellement le gouvernement de  l’Alliance Lepep ne jouit pas de la même popularité qu’avant la tenue et peu après les élections générales de 2014. Actuellement, il y a un effritement et la population est mécontente. Les Mauriciens sont en colère. La baisse de la popularité de l’Alliance Lepep, qui est palpable, peut avoir une répercussion néfaste et grave  lors des prochaines élections générales.

J’ ajouterais que Navin Ramgoolam a le droit de se porter candidat aux prochaines élections générales ou  à une élection partielle car il n’a pas été condamné jusqu’ici par la cour. Rien ne peut l’empêcher de refaire surface.

 

Q : Dans le cadre de l’enquête opposant  l’Equal Opportunities Commission  à Vijaya Sumputh,  dont la nomination au poste de directrice du Cardiac Centre, le ministre de la Santé aurait décidé de ne pas se présenter devant l’EOC. Quelle est votre opinion à ce sujet ?

R : Je respecte beaucoup l’EOC, qui intervient lorsqu’il s’agit des cas d’inégalité ou d’injustice. Elle les corrige. J’espère qu’Anil Gayan en tant que légiste, ne va nullement mettre en péril l’existence de cette institution importante.

 

Q : Pouvez-vous vous prononcer sur le courriel, qui émane d’un membre fondateur du ML et qui a été adressé aux membres du parti au début de la semaine ?

R : Je comprends que cette personne est découragée par cet événement qui secoue le ML et qu’il souhaite redresser la situation pour le bien-être de tous les membres du parti.

 

Q : Certains menaceraient même de démissionner du ML si ce parti ne se réorganise pas. Ont-ils raison ?

R : Le ML doit revoir toute sa stratégie politique, plus particulièrement en termes d’organisation et de mobilisation. Il est impératif que le ML doive mettre sur pied des cellules à travers l’île. Le ML, qui a des atouts, doit être aussi beaucoup agressif sur le terrain. En tant qu’un jeune parti politique, le ML compte trois  ministres, deux PPS et deux députés au sein du gouvernement.

Le ML doit saisir des opportunités pour devenir un parti fort sur l’échiquier politique. La direction du parti aurait dû s’asseoir autour d’une table pour discuter avec les membres qui auraient critiqué le parti ou le gouvernement ou ceux qui auraient signifié leur intention  de prendre leurs distances du parti. Mais dommage qu’on n’en soit pas arrivé là.

 

Q : Quelle opinion faites-vous d’Ivan Collendavelloo ?

R : Le leader du ML, Ivan Collendavelloo, est une personne très intelligente. Il est un fin légiste, qui a une longue carrière politique à son actif. Il y a eu des divergences de vues au sein du MMM lorsque la direction du parti ou plutôt Paul Bérenger avait voulu concrétiser une alliance avec le Parti travailliste du Dr Navin Ramgoolam. C’est pour cette raison qu’Ivan Collendavelloo avait quitté le MMM, car la démocratie n’existait pas. De plus, on n’avait pas organisé des débats avant de décider de la concrétisation d’une alliance PTr-MMM. La direction aurait dû être à l’écoute de ses membres et de la population avant de prendre une telle décision.

Je dirais également que j’ai nourri des relations très civilisées avec Ivan Collendavelloo. Selon moi, il est un politicien mûr. Je sais qu’il est sûr de ce qu’il doit faire.

 

Q  : A-t-il l’étoffe pour succéder à Paul Bérenger comme il le souhaite pour réunir la grande famille militante ?

R : Je suis d’avis qu’Ivan Collendavelloo doit réunir toute la famille militante, qui se trouve dans les différents coins de l’île. Je le souhaite de tout cœur qu’on puisse atteindre ce but.

En ce qui concerne Paul Bérenger je pense que ce dernier est un leader politique hors concours. Il n’est pas question de partisannerie. J’ai été membre du MMM pendant 20 ans. Bien qu’il y ait des divergences de vues avec Paul Bérenger, je peux vous dire qu’il possède une grande expérience dans le domaine politique et qu’il est très discipliné.

 

Q : Au fil des années et des élections, le MMM s’est scindé et aujourd’hui, outre le MSM, il y a le ML et le MP qui ont été formés à la suite de profondes divergences au sein des mauves. Qui est le principal responsable de cette situation et combien de catégories de militants finirons-nous par avoir ?

R : Bien sûr, la concrétisation de l’alliance PTr-MMM a fait beaucoup de mécontents au sein de la famille militante.  Les militants du MMM restent avec le MMM. S’ils quittent le MMM, ils ne seront pas considérés comme des militants du MMM. Evidemment les membres et partisans du ML ou du MP ne peuvent prétendre être aussi membres et partisans du MMM. Une réunification est possible s’ils rejoignent le MMM.

 

Q : Le leader du MMM, Paul Bérenger, a signifié son intention de se présenter comme Premier ministre. Qu’en dites-vous ?

R : C’est le droit de Paul Bérenger et le MMM peut présenter ce dernier comme Premier ministre. Les dernières élections générales ont prouvé que l’électorat a mûri et que les Mauriciens voteront pour des gens compétents  peu importe leur religion, leur communauté ou leur appartenance politique.  J’étais ministre sous le primeministership de Paul Bérenger et de sir Anerood Jugnauth. Ils ont tous deux été excellents.

 

Q : Pensez-vous que le ministre Roshi Bhadain aurait eu un rôle important à jouer dans la divulgation des documents concernant le prêt de Vishnu Lutchmeenaraidoo ?

R : Je ne peux me prononcer sur la question. Mais  laissez-moi vous dire que c’est grave qu’on ait publié des documents bancaires confidentiels dans les journaux. Je suis sûr que les investisseurs et les clients d’offshore sont très concernés. Dans un pays, le patron  de la banque concerné aurait été tout de suite révoqué. Il ne faut pas oublier que les services financiers constituent un pilier important de notre économie.

 

Q : La nomination de proches des politiciens au sein des institutions gouvernementales est mal perçue par les Mauriciens. Etes-vous sur la même longueur d’onde ?

R : Oui. Les Mauriciens en général sont très en colère.  Mais il y a aussi certaines nominations qu’on n’arrive pas à comprendre comme celle d’Arjoon Suddhoo, qui est à la tête de trois institutions importantes  du pays. Il occupe le poste du directeur du Mauritius Research Institute, celui du  Chairman d’Air Mauritius et aussi de la Mauritius Renewable Energy Agency. Même s’il est intelligent, il paraît qu’il est difficile qu’il se concentre dans les affaires de trois institutions importantes, surtout qu’il y a une qui est nouvelle, la Mauritius Renewable Energy Agency.

 

Q : Croyez-vous sincèrement que l’Alliance Lepep irait jusqu’au bout de son mandat ?

R: Certainement, malgré qu’on note des tiraillements de part et d’autre. «  Dehors le temps pas bon. Zotte préfèrent reste dans la caze ».

 

Q : La rentrée parlementaire est prévue pour le 29 mars. Comment comptez-vous affronter vos amis qui se trouveront sur les bancs de la majorité ?

R : Affronter ? Je n’ai pas peur d’affronter mes adversaires. Je  continuerais à faire  mon travail en tant que député comme je le fais jusqu’à présent. Mes amis resteront mes amis.