Pétition électorale : Navin Ramgoolam apporte plusieurs éléments troublants

La pétition électorale du leader du Parti travailliste, le Dr. Navin Ramgoolam, a été logée en cour suprême le jeudi 28 novembre. Ce dernier conteste les résultats proclamés dans la circonscription no 10 (Montagne Longue / GRSE), et demande à la cour d’invalider ces résultats, ou à défaut d’ordonner un ‘recount’. Il a assigné comme défendeurs  les trois élus de cette circonscription (Vikram Hurdoyal, Zahid Nazurally, et Somilduth Bholah), le Commissaire électoral, l’Electoral Supervisory Commission (ESC), et le ‘Returning Officer’, Kritananda Naghee. Selon le Dr. Ramgoolam dans sa petition, « That at the outset, the elections of the 7th November 2019 were far from being free and fair. »

Plusieurs points ont été ainsi soulevés par le Dr. Ramgoolam :

La propagande de la MBC

Le Dr. Ramgoolam accuse la MBC dans sa pétition de s’être livrée à un « orchestrated campaign » qui a donné un « unfair advantage » à l’Alliance Morisien. Par exemple, le 19 octobre, la MBC aurait diffusé une information selon laquelle le Dr. Ramgoolam aurait détourné des fonds du Parti travailliste et aurait diffusé les détails de ses comptes en banque, détails confidentiels qui ont été obtenus par la police par un ordre de la cour.

Le 5 novembre, deux jours avant la tenue des élections, la MBC aurait laissé Somduth Dulthumun faire un appel de nature communale lors des informations télévisées du soir, en semant la division entre les communautés hindoue et musulmane. Dulthumun avait invité « la grande famille hindoue » à donner une leçon au Dr. Ramgoolam.

L’Electoral Supervisory Commission (ESC) avait même rappelé à l’ordre la MBC, à l’effet qu’elle agissait à  l’encontre des dispositions de la MBC Act, suite à une plainte du PTr.

Les électeurs non-inscrits

La pétition du Dr. Navin Ramgoolam a aussi mis l’accent sur le fait que plus de 6 800 électeurs n’ont pu voter car ils ne figuraient pas sur la liste électorale. Toutefois, il n’y a aucune indication combien de ces électeurs non-inscrits concernaient la circonscription no 10.

Le choix de la date des élections

La date du 7 novembre a aussi été remise en question, car c’était la période les examens de fin d’année. Ainsi, de nombreuses écoles n’ont pu être utilisées comme centre de vote. Résultat : cela a engendré une confusion dans la tête de nombreux électeurs, car ces derniers, qui avaient l’habitude de voter dans un centre de vote particulier, n’ont pu retrouver leurs noms dans le centre de vote où ils ont été redirigés.

Le nombre de bulletins de vote

Combien de bulletins de vote ont été fournis aux centres de vote ? C’est là une question pertinente qui a été soulevée par le Dr. Navin Ramgoolam. Selon lui, le ‘Returning Officer’ n’a pas été informé du nombre de bulletins qui ont été fournis aux divers centres de vote tombant sous sa juridiction. Or, cela est important en vue d’effectuer une réconciliation des bulletins utilisés, ceux non-utilisés et ceux qui ont été rejetés.

Imposture : quand une personne défunte peut voter…

Le Dr. Navin Ramgoolam affirme avoir vu de ses yeux un cas d’imposture, où une personne décédée a été autorisée à voter, alors que le ‘Registration Officer’ n’a pas mis à jour la liste de personnes décédées, liste qui doit être fournie par l’état civil.

Les bulletins qui se baladaient dans la nature

Navin Ramgoolam a aussi soulevé l’affaire des trois bulletins de votes des circonscriptions no 3, 4 et 20, qui se baladaient dans la nature, alors qu’ils devaient être sous la garde des autorités.  Affaire qui, notons-le, fait actuellement l’objet d’une enquête de policière.

Y a-t-il eu « stuffing » des urnes ?

Selon Dr. Navin Ramgoolam, il aurait reçu des informations dignes de foi à l’effet que des bulletins ont été imprimés hors du Government Printing Office, notamment par Quad Printing à Coromandel. Selon lui, « This fact casts a cloud a corruption and deviousness on the election process as there is a real likelihood that stuffing would have occurred nationwide, including Constituency No 10. »

Trois candidats portaient le nom de Ramgoolam

Ont aussi été appelés comme codéfendeurs deux autres personnes qui portaient le nom de Ramgoolam, en l’occurrence Aniket Ramgoolam et Pravesh Ramgoolam. Selon le Dr. Navin Ramgoolam, le fait qu’il y avait trois personnes qui portaient le nom de Ramgoolam avait crée une confusion dans l’esprit des fonctionnaires chargés du décompte.

Irrégularités durant le dépouillement

La pétition s’est exhaustivement étendue sur ce qui s’est passé à l’école Ramnarain Roy le jour du dépouillement. Selon le Dr. Dr. Navin Ramgoolam, le « chaos » régnait en maître. Il devait remarquer que des bulletins traînaient aux alentours et l’absence de sécurité était flagrante.

Le Dr. Navin Ramgoolam et ses agents devaient constater que sur deux urnes, les scellés qu’ils avaient apposés sur l’interstice des urnes avaient été brisés, un fait qui avait été notifié au représentant de l’Electoral Supervisory Commission (ESC). Selon le Dr. Navin Ramgoolam, il y a des raisons de croire que ces urnes ont été manipulées.

Les urnes ont été ouvertes et les bulletins rempilés en lots  de 100, puis refourgués dans les urnes non scellées. Ces urnes ont ensuite été transportées dans une salle où elles ont été laissées sans surveillance. Ce n’est que quelques heures après qu’elles ont été transportées dans les 22 salles de dépouillement. Le décompte a commencé vers les 13 h 30 alors que selon les règlements, cet exercice aurait dû avoir commencé vers les 8 heures du matin.

Selon la pétition, le Returning Officer aurait permis des pauses dans certaines salles de décompte en plein dépouillement et de ce fait, il n’y a pas eu de ‘continuous counting’. En outre, Vikram Hurdoyal, l’élu du MSM, aurait même acheté et fourni des repas aux officiers responsables du décompte durant ces pauses. Le Dr. Navin Ramgoolam est catégorique : il s’agit là d’un « an act of  treating ».

Que se passait-il dans la ‘Computer Room’ ?

Une nouvelle procédure informatisée lors des élections du 7 novembre, qui n’aurait jamais été auparavant utilisée lors d’une élection à Maurice laisse aussi planer des doutes majeurs.  Il y avait une salle d’ordinateurs au centre de dépouillement, installés par les soins de State Informatics Ltd, une compagnie gouvernementale, où les résultats, pris dans les salles de décompte, étaient canalisés. Cette nouvelle méthode a été utilisée dans toutes les circonscriptions.

Les préposés de la Commission électorale recueillaient les chiffres à parti des salles de décompte, sans que le ‘counting agent’ de l’Alliance Nationale n’ait pu les vérifier, les canalisant vers la salle d’ordinateurs, où les chiffres étaient ensuite compilés sur ordinateur en l’absence des agents de l’Alliance Nationale, car ces derniers n’avaient pas accès dans cette salle d’ordinateurs.  Selon le Dr. Ramgoolam, personne ne sait ce qui s’est passé dans cette salle  et personne n’a pu vérifier si les chiffres pris dans les salles de décompte avaient bien été effectivement transmis dans cette salle d’ordinateurs. Il n’y avait aucune transparence quant aux personnes qui compilaient sur les ordinateurs les chiffres puisés depuis les salles de décompte.

Qui plus est, le système se serait ‘crashed’ en plein exercice de dépouillement. Or personne n’était au courant de ce crash  et il n’y a aucune indication du ‘data’ qui a pu être perdu en termes de votes comptabilisés. Là où le bât blesse, c’est que cette nouvelle procédure informatique ne fait pas l’objet de règlements visant à assurer sa transparence.

 Irrégularités durant le transport des bulletins au centre de dépouillement 

Le ‘Returning Officer’ ne s’est pas assuré que les agents sélectionnés pour escorter les fourgons transportant les urnes aient pu le faire.  Ainsi, un certain nombre de fourgons a quitté les centres de vote vers le centre de dépouillement sans aucun agent de l’Alliance Nationale pour les escorter.

Tout ceci fait que ce ne sont pas les vrais résultats qui ont été proclamés, selon Navin Ramgoolam : « Le vœu de l’électorat de la circonscription no 10 n’a pas été fidèlement proclamé dans les résultats. »

Le Dr. Navin Ramgoolam demande à la Cour suprême de déclarer nulle et non avenue l’élection des trois candidats .Ou alternativement, d’ordonner un ‘recount’ dans la circonscription no 10, qui se fera en présence du Dr. Navin Ramgoolam, des défendeurs, et que le ‘Returning Officer’ proclame une nouvelle fois les résultats en vertu du ‘recount’.

 

 

  Hors-texte

Le désordre à l’école Ramnarain Roy a affecté le dépouillement, selon Navin Ramgoolam

Avec le chaos déjà existant, une foule grandissante des partisans de l’Alliance Morisien devait envahir la cour de l’école Ramnarain Roy, foule qui selon le Dr. Navin Ramgoolam, avait été autorisée à entrer dans les lieux.  Au fur et a mesure, la foule devenait de plus en plus vociférante.

Le Dr. Navin Ramgoolam s’était rendu à l’école Ramnarain Roy aux petites heures du 9 novembre pour demander un ‘recount’. A l’entrée, il fut conseillé par la police de ne pas se rendre à l’intérieur, mais il insista pour le faire. Il fut copieusement insulté par la foule de sympathisants de l’Alliance Morisien.

Elle devait même devenir carrément hostile envers les adversaires de l’Alliance Morisien, plus particulièrement le Dr. Navin Ramgoolam et les agents de l’Alliance Nationale. La police dut faire appel aux éléments de la SSU mais rien n’y fit. La foule devait même se montrer si hostile envers le Dr. Navin Ramgoolam que ce dernier devait quitter les lieux sous forte escorte policière. Les agents de l’Alliance Nationale durent évacuer les lieux en catastrophe, craignant pour leur vie. Selon Dr. Navin Ramgoolam, cette intrusion  a créé une disruption dans le processus de décompte. Ajouté au chaos qui régnait déjà, il est plus que probable que des multiples erreurs se soient glissées dans le décompte. Le Returning Officer aurait du suspendre l’exercice de décompte pour être repris le lendemain, selon Navin Ramgoolam.

Il devait voir Sooroojdev Phokeer, récemment élu Speaker de l’Assemblée nationale dans le bureau du ‘Returning Officer’. Ce dernier dans un premier temps refusa de rencontrer le Dr. Navin Ramgoolam, mais changea finalement d’avis. Le leader du Ptr présenta alors une requête pour un ‘recount’.

Après la proclamation des résultats vers 3 h 30 du matin, il attira l’attention du ‘Returning Officer’ sur les irrégularités qu’il a constatées, notamment que les chiffres publiés à partir des salles de décompte 12 et 15 n’étaient pas les mêmes que le nombre de votes actuel dans ces salles, selon le nombre de bulletins

Mais le ‘Returning Officer’ n’accorda pas de ‘recount’ vu qu’il considérait cela comme déraisonnable. Selon Dr. Navin Ramgoolam, le ‘Returning Officer’ n’aurait pas pris à leur juste mesure les raisons qu’il a avancées pour un ‘recount’. Ce dernier fit remarquer qu’il n’y avait pas eu de complainte durant le décompte pour qu’il ordonne un ‘recount’ et que les agents du Dr. Navin Ramgoolam  étaient présents lors du décompte. Mais pour le Dr. Navin Ramgoolam, cela ne constitue pas de raison valable pour refuser un ‘recount’. En outre, lui et ses agents ont été contraints de quitter les lieux avant la fin du décompte et la loi ne précise pas quand la requête pour un ‘recount’ doit être présentée.

Les résultats ont ensuite été proclamés le lendemain 9 novembre, vers les 3 h du matin, quelque chose sans précédent dans les annales de Maurice.