Mort de Kistnen et emploi fictif : Complicité indéniable de la police pour dévier les enquêtes et épargner Yogida Sawmynaden 

Des révélations, il y en a à la pelle dans l’affaire Kistnen et l’emploi fictif de Simla Soopramanien. Et elles tendent souvent à démontrer qu’il y aurait peut-être eu une certaine complicité de la police, à plusieurs niveaux, pour dévier les enquêtes, à défaut de les faire capoter tout court. Pourquoi ? Est-ce pour protéger un membre du gouvernement, en l’occurrence l’ancien ministre Yogida Sawmynaden ? La police, qui tombe sous la responsabilité du Premier ministre et ministre de l’Intérieur, portefeuille qu’occupe Pravind Kumar Jugnauth, est-elle censée faire le jeu du gouvernement en pervertissant le cours de la justice au lieu de faire triompher la vérité et la justice ?  Cela ne devrait pas être le cas. Pourtant, c’est la perception qui se dégage de plus en plus au vu des témoignages en cour de Moka d’une part et de la façon de procéder des enquêteurs d’autre part.

 

  • La mort de Kistnen traité de suicide au lieu d’homicide

On se souviendra que la mort de l’agent du MSM Soopramanien Kistnen avait été au départ traité comme un suicide, malgré les doutes insistants exprimés par sa veuve Simla Soopramanien. Elle doutait effectivement que son époux avait été assassiné car il comptait faire des dénonciations contre Yogida Sawmynaden à l’ICAC. Il a fallu que les services de Rama Valayden soient retenus, à titre pro-bono, pour que le CCID vienne de l’avant pour dire qu’il enquête sur un cas d’homicide. Toute cette affaire, et ses nombreuses ramifications, aurait été tuée dans l’œuf si la veuve de Kaya n’avait pas persévéré pour connaître la vérité.

 

  • Refus d’enregistrer la déposition de Koomadha Sawmynaden

Un ami de Soopramanien Kistnen, Koomadha Sawmynaden a révélé sous serment en Cour de Moka qu’il s’était rendu à la CID de Moka le 26 octobre 2020, documents à l’appui, pour faire état des cas de fraude et de corruption contre son frère Yogida Sawmynaden. Le sergent Rostom l’a écouté pendant trois heures dans ‘lakwizinn’ du poste de police sans que ce dernier ne fasse même une entrée dans le ‘diary book’ de la police. Cette révélation avait été confirmée par le sergent Rostom lui-même. En guise de défense, il a expliqué n’avoir pas agi parce qu’il s’agissait d’une affaire sensible et qu’il avait préféré attendre que Koomadha Sawmynaden y retourne en compagnie de son avocat pour consigner sa déposition. En d’autres mots, si Koomadha Sawmynaden avait opté de ‘back out’ concernant la déposition qu’il était censé faire et s’il n’y avait pas eu d’enquête judiciaire, le sergent Rostom aurait fermé les yeux sur les graves allégations faites par Koomadha Sawmynaden tout simplement parce qu’un ex-ministre de la République était concerné. Un ministre est-il ‘above the law’, Sergent Rostom ?

 

  • Menaces par des enquêteurs du CCID

Autre révélation surprenante en Cour de Moka : un autre ami de Kistnen Soopramanien, Parsooramen Arian, a avoué avoir eu des menaces de la part des enquêteurs de la MCIT. Ces derniers lui auraient ordonné de dire que l’ex-agent du MSM serait mort chez Parsooramen Arian et que c’était lui et son frère qui auraient conduit le corps de Kaya dans le champ de cannes où son corps avait été retrouvé le 18 octobre dernier. Pourquoi ? Et si Parsooramen Arian avait cédé sous les pressions ? À qui aurait profité ces faux aveux visant clairement à pervertir le cours de la justice ?

 

  • Disparition et indisponibilité des images des caméras de surveillance

Fait troublant : Les images des caméras de surveillance de Safe City, qui a coûté à l’État la bagatelle somme de Rs 19 milliards, à Palma avaient tout bonnement disparu ! Pourtant, les caméras s’y trouvant étaient bel et bien opérationnelles. C’est ce qu’a confirmé le policier Abheeram posté au département Safe City Control. Face à ce manquement (intentionnel ?) de taille, la police avait été appelée à chercher des images des caméras privées se trouvant dans les parages de Palma et La Louise.

Or, une fois de plus, la police n’est pas parvenue à les obtenir bien qu’il y avait au total 63 caméras de surveillance, incluant celles des ‘guesthouses’ dans cette localité, selon le SP Dhawan. D’ailleurs, les ‘guesthouses’ sont tenus, selon la loi, à sauvegarder les images pendant au moins un an. Pourquoi la police n’a-t-elle pas agi contre ces ‘guesthouses’ ? Petit rappel : Vinay Appanah, beau-frère du directeur de la STC et directeur d’AV Techno World Co. Ltd, une compagnie ayant bénéficié de juteux contrats pendant le confinement, résidait dans une de ces ‘guesthouses’ appartenant à sa famille. Vous y voyez clair ?

 

  • L’amie d’enfance de Yogida accuse la police d’intimidation

 

Neeta Nuchched, l’amie d’enfance de Yogida Sawmynaden qui a également décroché des contrats, sans qu’elle n’ait d’expertise dans le domaine concerné, peu après la création d’une compagnie durant le confinement, a, elle aussi, accusé la police d’intimidation. Elle a allégué que l’enquêteur Norbert Manovooloo de la MCIT, lui aurait fait signe, alors qu’elle consignait sa déposition, de ne rien dire à propos de ses rencontres avec l’ancien ministre Sawmynaden. Une instruction qu’elle aurait respectée à la lettre en prétextant qu’elle n’était pas en contact avec Yogida Sawmynaden depuis six ans.

 

  • Convocation retardée et interrogatoire annulé

La convocation de Yogida Sawmynaden a-t-elle été délibérément retardée ? Nando Bodha, ancien ministre des Affaires étrangères et ancien secrétaire général du MSM, croit savoir que c’est le cas. « Fine fer tou pou traîne sa bane dossiers la depi des mois et des mois avec bane lenket pou évite ène scandale politique », a-t-il soutenu peu après la démission du ministre de Commerce mercredi. Les événements concordent avec ses affirmations.

Cela fait des semaines depuis que Yogida Sawmynaden aurait dû être convoqué, interrogé et inculpé dans l’affaire d’emploi fictif. Malheureusement, Lakwizinn de la police a tout fait pour retarder cette échéance, jusqu’au point d’embarrasser le bureau du DPP qui avait demandé un renvoi des travaux de la Cour dans le sillage de la « private prosecution » pour permettre que l’enquête soit bouclée.

Or, on sait maintenant qu’il s’agissait probablement d’un ‘delaying tactic’. Pire, même quand il a été convoqué, Yogida Sawmynaden n’a pas été interrogé à cause d’un point de droit constitutionnel soulevé par son homme de loi, Raouf Gulbul, alors que celui-ci ne tient pas la route, selon des avocats.

 

  • Forte mobilisation policière devant la Cour et aux Casernes centrales

Le fort dispositif de la police déployé aux abords de la cour de Port-Louis à chacune des comparutions de l’ancien ministre Sawmynaden en cour donne trahit le souci de la police de le protéger. Si le service de presse des Casernes centrales a donné une banale explication soutenant que la forte mobilisation policière du 7 janvier dernier était censée assurer la sécurité des manifestants et des passants, l’on ne sait pas par contre si le déploiement des éléments de la SSU aux Casernes centrales lors de la convocation de Yogida Sawmynaden au CCID mercredi visait à protéger les journalistes et photographes de presse (de qui d’ailleurs ?), à moins que ce ne soit de les empêcher de se rapprocher de l’ancien ministre. Il convient de rappeler aussi qu’aucun autre ministre ou même l’ancien Premier ministre Navin Ramgoolam n’a bénéficié d’un pareil traitement de la police.