Marche contre la drogue : Des employés de la Santé contraints d’abandonner leurs postes pour y grossir la foule

  • Les instructions étaient claires: “You are kindly requested to release at least 100 members of your staffs…” et “PM will attend. We need the maximum”.

C’est la grogne parmi le personnel hospitalier. Des employés de divers départements affectés dans les hôpitaux régionaux, dont des médecins, des officiers et des infirmiers, ont été contraints d’abandonner leurs postes, jeudi, afin de participer à la marche contre la drogue organisée par le bureau du Premier ministre en collaboration avec le ministère de la Santé. Une exigence à laquelle ils ont dû se plier à contrecœur et en reléguant leurs responsabilités professionnelles au second plan. Au grand dam des patients !

C’est dans une correspondance en date du  20 juin 2019 et adressée par le ministère aux responsables des cinq hôpitaux régionaux que mention est faite de cette marche organisée en marge de la Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues le jeudi 27 juin. « You are also kindly requested to release at least 100 members of your staffs comprising of Medical Health Officers/ Senior Medical Health Officers, Pre-Registration Nurse Officers, Nursing Officers and Paramedical Officers) falling under your purview »,  souligne la lettre. Les instructions suivies lors de divers appels téléphoniques par un haut cadre du ministère de la Santé, suivis par le PMO, aux chefs des hôpitaux régionaux sont on ne peut plus claires : « Try your best. PM will attend. We need the maximum ».

S’il est tout à fait normal pour le ministère d’organiser un tel événement, les employés déplorent toutefois qu’ils aient été utilisés à des fins bassement politiques, en raison de la présence du Premier ministre. D’autant que le service de la Santé a été relégué au second plan ce jour-là pour donner la priorité à cet événement. « C’est pas parski Pravind Jugnauth pe envie montré ki li pe combattre la drogue ki bizin servi nou pou alle grossi la foule et pou fer li gagne grandeur »,  fustige un employé mécontent. « Nous ne contestons pas le fait que des employés ont été appelés à y participer. Mais au moins 500 au total ? N’est-ce pas trop ? », s’interroge un autre. D’autant que, renchérit-il, les participants ont été appelés à se vêtir d’un t-shirt distribué à l’occasion et non leur uniforme. « Komsi zot pe rode montrer ki pas bane fonctionnaires sa mais bane membres de la population », ironise un infirmier.

Selon nos informations, l’excès de zèle du ministère aurait aussi refroidi des chefs de départements qui ont eu toutes les peines du monde à s’organiser pour que l’absence des employés, ne serait-ce que de quelques heures, ne se fait pas remarquer. Mais il semble que le ministère n’en aurait cure.

Visée politique

Puisque le gouvernement entame ses derniers mois au pouvoir, le Premier ministre a, semble-t-il, voulu marquer la journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues d’une pierre blanche en organisant cette marche visant à marquer les esprits tout en le présentant comme étant inébranlable dans sa lutte contre la drogue, dont il a fait son point d’honneur. Raison pour laquelle le ministère de la Santé a été appelé à mettre le paquet double afin de faire de cet événement un succès.  D’où les instructions données quant à la participation des employés de ce secteur.