Les questions qui intriguent

Rémission à Peroomal Veeren

  • Cette grâce présidentielle serait-elle liée avec le financement de la campagne électorale du MSM en 2014 ?

La rémission de plus de cinq ans accordée à Peroomal Veeren par la Commission de pourvoi en grâce le 18 novembre 2016 continue à soulever des vagues. Comme révélé dans notre dernière édition, le caïd a vu sa peine de 34 ans commuée à 30 ans de servitude pénale par la présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim. Est-ce une procédure légale normale à laquelle a droit un condamné ou y a-t-il anguille sous roche ? Certains n’hésitent pas à remettre en cause la décision de la Commission de pourvoi en grâce étant donné que le trafiquant faisait déjà face à un procès lorsque sa rémission a été avalisée. Selon Rama Valayden, celle-ci n’a rien d’anormal. « Il aurait pu s’en remettre à la cour, mais c’est plus facile d’avoir recours à la Commission de pourvoi en grâce. Légalement, cette dernière avait un point puisque le temps que le trafiquant est resté en détention préventive n’avait pas été pris en considération lors de sa condamnation », explique l’avocat.

Cependant, la Dangerous Drugs Act stipule qu’aucun trafiquant de drogue n’a droit à une rémission de sa peine. Ce que nous confirme Me. Yousuf Mohamed. « Si c’était en une cour de justice, cette rémission n’aurait pas été accordée. Mais la Commission de pourvoi en grâce a certains pouvoirs que la cour n’a pas et elle peut donc prendre des décisions à sa discrétion », souligne le Senior Counsel, en précisant qu’il ne peut pas commenter l’affaire puisqu’il représente les intérêts de Peroomal Veeren dans une autre affaire qui n’est pas liée à la drogue. « Il serait souhaitable que la Commission vienne de l’avant pour expliquer les circonstances et les critères sur lesquels elle s’est basée pour accorder cette grâce. Cela pourrait même faire jurisprudence », lâche-t-il.

Quelles connexions avec le MSM ?

Mais ce qui intrigue surtout, c’est que cette grâce est intervenue en 2016, soit sous le règne du présent gouvernement. « Lors de sa déposition devant la Commission d’enquête sur la drogue en août dernier, Peroomal Veeren a avoué avoir financé le MSM lors des législatives de 2014. Je me demande s’il n’y a pas un lien quelconque entre ce financement et cette rémission. Le pouvoir a-t-il, d’une façon ou d’une autre, influencé la décision de la Commission ? », se demande un avocat sous le couvert de l’anonymat. En effet, le trafiquant avait soutenu avoir financé la campagne du MSM pour les dernières élections. « J’ai investi beaucoup d’argent pour financer la campagne en 2014. Mahen Gowressoo était venu me voir avec Geeanchand Dewdanee. Ils voulaient de l’argent. Ils disaient que Pravind Jugnauth voulait devenir Premier ministre. En octobre 2014, j’ai donné de l’argent. Zot ti dir soit disant zot pou reouver mo case… », avait soutenu Peroomal Veeren devant le commissaire Paul Lam Shang Leen. Mahen Gowressoo et Geeanchand Dewdanee s’étaient-ils effectivement rendus à la prison pour rencontrer le trafiquant de drogue ? Si oui, comment ont-ils pu y avoir accès alors qu’ils ne sont ni les conseillers légaux ni les proches du prisonnier ? Y a-t-il eu une négociation quelconque lors de cette rencontre, si celle-ci a effectivement eu lieu ?

Pour sa part, le travailleur social Ally Lazer se dit « révolté » par cette décision. « Cette rémission prouve que ce gouvernement n’a pas de réelle volonté pour combattre le trafic de drogue », tonne-t-il en se demandant si le trafiquant n’a pas bénéficié de protection occulte.

Silence total !

Nos tentatives pour avoir les explications de la Commission de pourvoi en grâce sont restées vaines. Un mail que nous avons envoyé à la State House en milieu de semaine est également resté sans réponse. Une explication claire et nette de la Commission ou de la Présidence aurait pu nous permettre de faire la lumière sur toute cette affaire.