Le jardin de la (mauvaise) compagnie

Après l’abattage des corbeaux par les officiers de la Special Mobile Force, le Jardin de la Compagnie est plus tranquille. Ces oiseaux dits de mauvais augure avaient la fâcheuse tendance de faire un boucan infernal, mais aussi d’éparpiller le contenu des poubelles. Ce lieu, très fréquentée par les touristes et les promeneurs, est toutefois toujours vu sous un mauvais œil. Un autre nettoyage s’impose et quand on parle de nettoyage, on parle de tout ce qui vient faire tâche d’huile dans le tableau.

Le Dr. Mamad Kodabaccus, membre du PMSD et conseiller de la municipalité de Port-Louis, ne cache pas son irritation concernant le Jardin de la Compagnie. « On a tué les corbeaux, c’est très bien, mais à part cela, je pense qu’on pourrait faire bien plus. Le jardin est à l’abandon, personne ne s’en soucie. Par ailleurs, est-ce que nous avons même une municipalité ? Je me pose la question parce que rien ne se fait », martèle ce dernier.

Qu’advient-il des filles de joie qui ‘rod enn lavi’ en ce lieu? Nul ne peut répondre de façon satisfaisante, même pas un membre du Conseil municipal, proche du gouvernement, qui dira ne pas être au courant de la situation ! Comment ne peut-on pas voir les choses alors que la situation saute aux yeux depuis trop longtemps ? Tous ceux que nous croisons nous disent la même chose concernant le jardin. Roseline, une habitante de la capitale, nous explique, « Pa kapav mars tousel, surtout kan ou enn vieille personne, zot koner kan ou ale prend pension ek zot atak ou… fer bien peur pou passe dans zardin, ek en plein li zour, li pli grave ! »

Apres les attaques et les vols à l’arraché, les incertitudes règnent. Pour rappel, un octogénaire avait même trouvé la mort en février, assassiné par deux filles de joie. À la nuit tombée, ce lieu devient un véritable guet-apens pour ceux qui osent s’y aventurer. Tapies dans l’ombre, les prostituées, et parfois leurs proxénètes, guettent leurs prochaines victimes. Et là, il ne s’agit plus de simple harcèlement des « clients ». De plus, le manque d’éclairage vient compliquer la situation.

Mais que font les autorités? Les patrouilles de police sont-elles efficaces ? Pas vraiment, car ces rapaces nocturnes reviennent sans cesse sur leur terrain de prédilection, même après avoir été chassées par la police.

Ce jardin aurait dû être un endroit où il aurait fait bon de se détendre et Mamad Kodabaccus explique que tel a été son engagement lorsqu’il était maire. Il ne comprend pas pourquoi aujourd’hui, alors que la ville de Port-Louis aurait dû avoir évolué, le problème est toujours là. « Quand j’étais maire, j’avais installé des radios dans le jardin, et pris des initiatives pour le rendre plus agréable, où les gens pouvaient venir déjeuner dans un cadre plus agréable. Aujourd’hui… il n’y a qu’à voir l’état des toilettes…je pense qu’’ils dilapident tout, comment voulez-vous qu’ils s’occupent du jardin en priorité ! », dit-il avec exaspération.

Sharone Samy