Le Japon en récession, le pire encore à venir

La récession est de retour au Japon, qui a connu entre janvier et fin mars un deuxième trimestre de contraction d’affilée de son produit intérieur brut (PIB), alors que la crise du coronavirus commençait à frapper.

Le PIB a reculé de 0,9% au premier trimestre 2020 par rapport au quatrième trimestre 2019, où il s’était déjà contracté de 1,9% (contre -1,8% annoncé lors d’une précédente estimation début mars), selon des données préliminaires publiées lundi par le gouvernement.

Le consensus d’économistes sondés par l’agence Bloomberg s’attendait à un repli légèrement plus important au premier trimestre (-1,1%).

C’est la première fois depuis 2015 que le Japon retombe en récession “technique”, définie par une contraction de la richesse nationale sur au moins deux trimestres.

Son économie était déjà mal en point depuis le quatrième trimestre 2019, en raison d’une hausse de deux points de la TVA depuis le 1er octobre, qui a plombé la consommation des ménages, et du passage dévastateur d’un puissant typhon, Hagibis.

L’activité a poursuivi sa baisse au premier trimestre sous l’effet de la crise du coronavirus, qui a encore affaibli la consommation des ménages (-0,8% sur un trimestre) et réduit les investissements des entreprises, tant fonciers (-4,5%) que non fonciers (-0,5%).

– “Partie émergée de l’iceberg” –

La croissance des investissements publics, qui était constante en 2019 alors que le pays se préparait à accueillir les JO de Tokyo (désormais reportés à l’an prochain en raison de la pandémie), a aussi connu un coup d’arrêt au premier trimestre (-0,4%).

Le commerce extérieur a également été en berne, avec une contraction de 6% des exportations, partiellement compensée par une baisse marquée des importations (-4,9%).

“Le pire est encore à venir”, avait commenté Naoya Oshikubo, économiste de SuMi Trust, dans une note avant la publication de lundi. Il s’attend à un plongeon de 10,2% du PIB au deuxième trimestre par rapport au premier.

Les chiffres du premier trimestre “suggèrent que la propagation du virus a déjà porté un rude coup à l’activité économique en mars, en attendant bien pire au deuxième trimestre”, a aussi commenté Tom Learmouth dans une note de Capital Economics publiée lundi.

Capital Economics table sur une dégringolade de 12% du PIB nippon au deuxième trimestre comparé au premier.

La baisse de la consommation au premier trimestre n’est “que la partie émergée de l’iceberg”, avec une chute probablement vertigineuse ce printemps, a encore estimé M. Learmouth.

Car le gouvernement japonais a déclaré l’état d’urgence début avril face à la hausse de cas de Covid-19 dans l’archipel, tandis que la pandémie paralysait encore davantage l’Europe et les Etats-Unis.

– Plan d’aide XXL –

L’état d’urgence au Japon n’induit pas de confinement obligatoire mais permet aux gouverneurs des régions d’inciter les habitants à rester chez eux le plus possible, et aux commerces jugés non essentiels de baisser temporairement le rideau.

Le dispositif a été levé jeudi, avec deux semaines d’avance, dans 39 des 47 préfectures du pays, à la suite d’une forte baisse de nouveaux cas recensés de Covid-19. Mais il est maintenu pour le moment à Tokyo et dans les autres régions les plus urbanisées et industrialisées du pays.

Pour atténuer le choc sur les entreprises et les ménages, le gouvernement a dégainé un plan d’aide record de 117.000 milliards de yens (plus de 1.000 milliards d’euros), comprenant notamment une allocation forfaitaire de 100.000 yens (plus de 860 euros) par habitant pour soutenir la consommation.

Le gouvernement envisage désormais de renforcer encore ce plan d’aide. Quant à la Banque du Japon (BoJ), elle a considérablement dopé ses rachats d’actifs depuis mars, pour stabiliser le système financier et veiller à ce que le mécanisme du crédit ne s’enraye pas.

En rythme annualisé, le PIB nippon a chuté de 3,4% au premier trimestre. Mi-avril le Fonds monétaire (FMI) a prédit une chute de 5,2% du PIB japonais sur l’ensemble de l’année, en partant du principe d’une reprise de l’économie à partir du second semestre.

De son côté, la BoJ table sur une contraction de 3% à 5% du PIB japonais sur l’exercice 2020/21, entamé le 1er avril.