L.E : L’Islam, L’Esclavage et Nous

Nous commémorons à Maurice, le 1er février l’abolition de l’esclavage. Cette journée, nous permet d’avoir une pensée toute spéciale pour ceux et celles qui furent les victimes du système inhumain de l’esclavage – traités tantôt comme des bêtes et tantôt comme des objets.

Toutefois, une question controversée reste toujours posée par certains. Pourquoi le Coran ne mentionne-t-il pas clairement l’abolition de l’esclavage, comme il l’a fait pour la prohibition du vin, des jeux de hasard, de l’usure et des autres péchés défendus par l’Islam ?

À ce niveau, une halte historique s’impose. L’Islam est apparu alors que le monde était en pleine transition entre l’ère esclavagiste et l’ère féodale. Donc nécessairement, ses lois, ses doctrines et ses systèmes étaient adaptés à cette étape du développement historique.  Il reconnaît ainsi l’esclavage et la féodalité. L’Islam ne pouvait devancer le développement économique, ni apporter un nouveau système dont les potentialités économiques n’étaient pas encore prêtes.

L’Islam essaya de résoudre le problème des esclaves qui existait en Arabie en encourageant par différentes étapes les propriétaires à libérer leurs esclaves.

Première étape de la libération : La libération Morale

  • L’esclave n’est plus une chose/un objet mais un frère et une sœur,
  • L’esclave n’est plus une source d’argent mais une source de devoir,
  • Ne l’appelez pas mon esclave, mais mon fils et ma fille,
  • Ne jamais maltraiter un esclave, ni le frapper.

Deuxième étape : La libération réelle

  • L’abolition des sources de l’esclavage,
  • Pousser à libérer les esclaves à chaque incident,
  • Affranchir les esclaves pour l’expiation de certains péchés,
  • L’appel à libérer gratuitement les esclaves pour plaire à Dieu.

Dernière étape : L’intégration après la libération

Tout d’abord, l’Islam posait comme devoir pour les croyants le bon traitement des esclaves et le respect à leur égard. Le Prophète Mohammad (s.a.w) demandait par exemple aux croyants d’éduquer parfaitement leurs esclaves et de les apprendre progressivement à devenir indépendants avant de les affranchir. Il s’agissait ainsi de les préparer à leur future liberté. On comprend mieux la sagesse de ces mesures islamiques quand on voit ce qui s’était passé aux Etats-Unis au moment de l’abolition de l’esclavage. Certaines sources relatent qu’après une journée passée en liberté, de nombreux affranchis retournèrent chez leurs anciens maîtres pour leur demander de l’assistance. En effet, comme ils n’avaient jamais été confrontés aux impératifs de la vie active, ils ne pouvaient se débrouiller seuls dans le monde libre. On trouve d’ailleurs, dans la civilisation musulmane une particularité remarquable : qu’un grand nombre de savants et même de gouverneurs musulmans étaient d’anciens esclaves. Ce qui montre bien le degré d’érudition qu’ils avaient atteint avant même d’avoir retrouvé la liberté.

Le traitement des esclaves aux premiers temps de l’Islam avait atteint un niveau d’humanité tel qu’il n’a jamais été atteint ailleurs, au point que les esclaves affranchis refusaient de quitter leurs anciens maîtres, alors qu’ils en étaient parfaitement capables, après s’être libérés financièrement et après avoir pris l’habitude de se prendre en charge eux-mêmes. Les esclaves n’étaient plus des objets. Ils sont devenus des humains avec une âme identique à celle des maîtres.

L’étape constituait en réalité une libération morale des esclaves.  Ceux-ci étaient réintégrés à l’humanité et étaient traités avec la dignité originelle qu’ils partageaient avec leurs maîtres.  L’Islam a exigé le bon traitement des esclaves, car rien d’autre qu’un bon traitement ne peut rendre son équilibre à une psychologie déviante. Il était impératif qu’on lui rende son estime afin qu’il prenne conscience de son humanité et de sa dignité propre.

L’Islam ne s’arrêta pas là, car sa base fondamentale et suprême est l’égalité complète entre les hommes, ce qui signifie la libération complète de tous les hommes. Par conséquent, il œuvra de manière effective à la libération des esclaves, et ce, par deux grands moyens : le ‘Itq’ ou affranchissement volontaire et gratuit de la part des maîtres et la ‘Mukatabah’ ou contrat d’affranchissement qui consiste à accorder à l’esclave sa liberté lorsqu’il la demande de son propre chef, moyennant une somme d’argent convenue entre le maître et l’esclave. Cette voie fut celle empruntée bien après par l’Europe au 16e siècle.  D’ailleurs, le verset du Coran qui désigne les ayant-droits de l’aumône légale (zakaat) dit : « Les aumônes ne sont destinées que pour les pauvres, les indigents, ceux qui y travaillent, […] pour l’affranchissement des esclaves » ( 9 :60)

Le Messager scellait également des liens fraternels entre certains esclaves et certains notables arabes. Il conclut ainsi des liens fraternels entre Bilal Ibn Rabah et Khalid Ibn Ruwayh, entre son esclave affranchi Zayd et son oncle Hamzah. Cette fraternisation constituait un véritable lien, non moins puissant que les liens du sang, et donnait des droits en matière d’héritage. Le Prophète maria également sa cousine Zaynab Bint Jahsh à son esclave Zayd. Le Messager envoya même Zayd à la tête d’une armée dont les soldats n’étaient autres que des notables arabes

Quant aux femmes, l’Islam les a honorées, y compris en tant qu’esclaves. Une esclave qui accouchait d’un enfant de son maître s’affranchissait automatiquement, en même temps que son enfant. Elles avaient en outre droit au bon traitement commandé par l’Islam.

Telle est l’histoire de l’esclavage dans l’Islam, une page glorieuse de l’histoire de l’humanité. L’Islam n’a pas fait de l’esclavage un fondement immuable. La preuve en est qu’il a pris toutes les mesures pour libérer les esclaves, et qu’il a tari de manière définitive toutes les sources d’esclavage,

À chacun d’examiner si l’humanité a progressé en quatorze siècles d’éloignement de l’Islam ou si elle a poursuivi une inexorable régression morale. Au point qu’aujourd’hui, elle nécessite un flambeau de lumière qui la fera sortir des ténèbres dans lesquelles elle s’enfonce. Aujourd’hui, nous tirons une grande fierté en prétendant que les Européens ont aboli l’esclavage dans le monde, bien qu’ils aient eu la décence de le faire au milieu du siècle passé seulement. Avant cela, ces puissances occidentales pillèrent l’Afrique sur un très large plan, capturèrent les hommes libres, les réduisirent à la servitude et les transportèrent vers leurs nouvelles colonies. Le traitement infligé à ces malheureuses personnes a été pire que celui réservé aux animaux. Les livres écrits par les auteurs occidentaux eux-mêmes témoignent de ces faits.

Dans les guerres modernes nous constatons également que si un gouvernement est complètement mis en déroute, sans possibilité de négociation pour les prisonniers de guerre, et que l’ennemi vainqueur obtient facilement des prisonniers, l’expérience a prouvé que ces prisonniers de guerre de l’armée vaincue étaient maintenus dans des conditions beaucoup plus mauvaises que celles des esclaves. Les exemples abondent de nos jours. Quelqu’un peut-il nous renseigner sur le sort des milliers de prisonniers de guerre des armées défaites de l’Allemagne et du Japon capturés par la Russie durant la Seconde Guerre mondiale ? Personne n’a pu les comptabiliser jusqu’à présent. Personne ne sait combien de milliers d’entre eux sont encore vivants et combien de milliers ont péri en raison des conditions de vie inhumaines des camps de travail et de concentration. Le travail forcé et l’humiliation auxquels ils furent contraints étaient pires que le service exigé d’un esclave. Les prisonniers dans les geôles d’Israël, d’Abu Ghaib et ceux de Guantanamo en savent quelque chose.

Bashir Nuckchady