Kistnen Papers : Dépenses électorales au no. 8 Pravind Jugnauth et ses colistiers ont-ils fait de fausses déclarations ?

Le Premier ministre Pravind Jugnauth, et ses deux colistiers, Leela Devi Dookun-Luchoomun et Yogida Sawmynaden, ont-ils falsifié leurs dépenses électorales ? C’est la question qui se pose à la lumière des Kistnen Papers qui font surface. Ce document volumineux, tenu par Soopramanien Kistnen, agent du MSM décédé dans des circonstances douteuses l’année dernière, révèle bien de choses. Les dépenses encourues pour la circonscription no. 8 (Moka/ Quartier Militaire) durant la campagne électorale de novembre 2019 y sont soigneusement inscrits alors que des reçus y sont également agrafés. Un coup d’œil suffit pour comprendre que le trio Jugnauth-Dookhun-Luchoomun-Sawmynaden ont dépensé aveuglément. Preuve s’il le faut que le « money politics » était bel et bien au centre des dernières élections générales.

Selon le carnet de Kistnen, pour les seize jours de la campagne électorale, les trois candidats du MSM de Moka/ Quartier Militaire ont dépensé Rs 1, 7 millions rien que pour le ravitaillement de 55 bases. La location de 14 bases a, elle, coûté Rs 164 000. Pour ces deux items donc, Rs 1, 924, 000 ont été déboursés. Entre la location des véhicules, l’installation des salles vertes et la sonorisation, les briani et autres ravitaillements, les dépenses dépassent facilement les deux millions de roupies alors que le seuil autorisé pour les trois candidats d’un parti politique est en-dessous des Rs 500 000.

Selon la « Representation of the People Act », un candidat aligné par un parti politique n’a pas le droit de dépenser au-delà de Rs 150 000. Raison pour laquelle le montant des dépenses soumis par les candidats au bureau électoral, comme ils sont requis de le faire par cette même loi, ne dépassent jamais ce montant bien qu’il est connu de tous que le montant dépensé par chaque candidat avoisine ou dépasse généralement un million de roupies. Mais techniquement, la soumission de fausses déclarations concernant les dépenses électorales est passible de poursuites puisqu’elle constitue une infraction à la loi. Il va sans dire donc que les Kistnen Papers peuvent causer au Premier ministre et à ses deux colistiers des ennuis juridiques. Une piste que les détracteurs du gouvernement n’hésiteront pas à exploiter…

Vent de panique au no. 8 

C’est une scène à laquelle ont assisté plusieurs habitants de la circonscription no. 8, plus particulièrement à Quartier Militaire, mercredi soir. Alors que plusieurs pages d’un diary connu comme les Kistnen Papers circulaient sur Facebook, des agents du MSM du no.8 se sont réunis en toute urgence au domicile de l’un d’eux. D’ailleurs, au moins huit voitures étaient garées sur la route, en face du domicile de l’agent en question. Une réunion qui a débuté vers les 21h et qui a duré pendant au moins deux heures.

Ils ont été priés, surtout ceux qui s’étaient occupés des finances durant la campagne électorale de novembre 2019, de ne laisser aucune trace concernant les dépenses. Ce qui trahit le sentiment de l’hôtel du gouvernement, plus précisément du PMO qui soutenait pourtant sur les ondes d’une radio privée que les Kistnen Papers ne valaient rien.

Il nous revient que depuis jeudi après-midi, des copies du diary en question ont atterri au bureau de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) à Réduit. Pour l’heure, et comme d’habitude lorsqu’il s’agit du gouvernement, aucune décision n’a été prise concernant l’ouverture d’une éventuelle enquête. Le dossier serait ainsi référé à un board qui décidera par la suite si la commission y enquêtera ou pas.

 

Simla Kistnen remet trois nouveaux documents à la MCIT

La veuve de Soopramanien Kistnen, Sakuntala Soopramanien, s’est rendue à la Major Crimes Investigation Team (MCIT) hier matin (9 janvier), avec les avocats de l’équipe ‘Avengers’, pour donner sa version des faits.

Pour rappel, Simla Kistnen a déjà logé une ‘private prosecution’ en Cour de Port-Louis le lundi 21 décembre contre le ministre Sawmynaden pour “Abuse of Authority by Public Officer, sous la section 77 du Code pénal. Cette affaire est actuellement entendue en Cour de district de Port-Louis, dans un procès présidé par la magistrate Bibi Zeenat Cassamally. La prochaine séance est prévue pour le mardi 12 janvier.

La veuve de kistnen accuse le ministre Yogida Sawmynaden de l’avoir enregistrée comme sa ‘Constituency Clerk’, ce qui l’a empêché de recevoir une quelconque allocation sous le ‘Self-Employed Assistance Scheme’ (SEAS). Sakuntala Soopramanien affirme aussi qu’elle n’a jamais reçu le salaire de Rs 15 000 prévu sous ce poste. Notons que cette dernière avait rapporté cette affaire à l’ICAC et à la police en décembre.

C’est vers 14 h 30 que Sakuntala Soopramanien devait finir de consigner sa déposition. Le ‘leading counsel’, Me Rama Valayden, devait déclarer à sa sortie des locaux de la MCIT que trois nouveaux documents ont été remis aux enquêteurs pour étayer les dires de la veuve. Selon lui, il est plus que temps que le ministre Yogida Sawmynaden soit convoqué par la police pour venir s’expliquer.

Me Roshi Bhadain, quant à lui, devait expliquer qu’après cette déposition, rien ne changera en ce qui concerne les plaidoiries sur des points de droits, dans le procès qui oppose Simla Kistnen au ministre Sawmynaden, dont la prochaine séance est prévue mardi prochain en Cour de Port-Louis.

“Nous avons constaté que dans le cas de Rachna Seenauth et celui des frères Dardenne, à quelle vitesse la police est allée arrêter les prévenus. Nous attendrons jusqu’a lundi que le ministre Sawmynaden vienne au CCID, et que la police loge avec la même célérité une charge provisoire contre lui », souligne pour sa part Me Rouben Mooroongapillay.

Pour Me Anoop Goodary, c’est une affaire qui s’apparente à une escroquerie.