Interview de Adrien Duval, Deputy Speaker de l’Assemblée nationale : « Les règlements de compte doivent être réglés au Conseil des ministres »

Le Deputy Speaker de l’Assemblée nationale, Adrien Duval, affirme que le PMSD apportera tout son soutien à Pravind Jugnauth lorsque ce dernier deviendra Premier ministre. Il ajoute que les tiraillements entre les membres du gouvernement projettent une mauvaise image pour le pays. Notre invité du jour soutient également que le MMM se dirige tout droit vers l’implosion s’il continue d’appliquer une politique passéiste et dépassée à contre-courant des désirs de changement et à appliquer ses pratiques politiques rétrogrades. Il soutient aussi qu’à travers le “PMSD Got Talent”, son parti veut encourager l’émergence des talents en créant les opportunités adéquates pour les jeunes et le développement de leurs talents.

Sanjay BIJLOLL

 

Q : Pravind Jugnauth nommé Premier ministre sans passer par les urnes. Êtes-vous en faveur d’une telle démarche ?

R : Évidement que je suis en faveur de cette démarche. Je suis convaincu que Pravind Jugnauth saura donner une nouvelle dimension au gouvernement. Il lui faudra imposer son style et sa vision au gouvernement. Notre programme 2014-2019 est ambitieux, il faut maintenant pouvoir le réaliser. Le gouvernement de Pravind Jugnauth saura le faire.

C’est tout à fait légitime qu’il soit nommé Premier ministre dans l’éventualité que le poste devienne vacant, car étant leader du parti disposant le plus grand nombre de membres au Parlement et du soutien de tous les parlementaires de l’Alliance Lepep, le poste lui revient forcément. Donc, vous voyez bien que la question d’élections ne se pose pas. L’exemple très récent de la succession de Theresa May à David Cameron en Angleterre le démontre clairement.

Q : Lors du congrès de dimanche dernier, le leader du PMSD, XLD a soutenu que la succession de SAJ n’a jamais été discutée avec le PMSD avant les élections. Qu’en est-il au juste?

R : Oui en effet, Xavier-Luc Duval a été clair à ce sujet. Il a affirmé que la question de succession de sir Anerood Jugnauth (SAJ) n’avait pas été évoquée lors des discussions entre le PMSD et le MSM, avant les dernières élections, mais que celle-ci était toutefois une possibilité.

Il a cependant affirmé que le PMSD apportera tout son soutien à Pravind Jugnauth lorsque ce dernier deviendra Premier ministre.

 

Q : Il semble qu’il y ait un malaise entre le MSM et le PMSD. Cela est-il le cas ?

R : Je ne partage pas votre avis. Nous avons, au contraire, exprimé sans réserve notre soutien à Pravind Jugnauth au sujet de son accession au poste de Premier ministre.

 

Q : Le PMSD et le MMM se livrent ces jours-ci à une bataille médiatique sur les réseaux sociaux. Le MMM serait-il devenu votre adversaire principal ?

R : N’ont-ils pas été adversaires depuis toujours ?  Se sentant menacé, pour ne pas dire dépassé, le MMM essaye, par tous les moyens, d’assurer aujourd’hui sa survie. Il est regrettable, après 47 ans d’existence, que ce sont les mêmes attaques personnelles et les mêmes discours qui soient toujours utilisés. Rien de nouveau, nous entendons encore le même refrain en boucle.

C’est triste que le MMM ne soit plus capable de moderniser sa façon de faire. Il est même, aujourd’hui, dangereux pour notre pays que le MMM, autrefois connu pour être un parti d’opposition jouant un rôle de vrai chien de garde, se complaise dans son travail d’opposition artificielle qui ne fait son travail uniquement lorsque cela sert leur intérêt. Une telle attitude va à l’encontre même de notre modèle démocratique et c’est tout le pays qui en est perdant. C’est malheureusement la marque de fabrique du MMM d’aujourd’hui. Certains auraient pu croire qu’après l’épisode de 2014 où le MMM a abandonné son rôle d’opposition pour des raisons d’opportunité électorale pour conclure, derrière le dos de la population, un pacte avec le Parti travailliste alors au pouvoir, qu’ils auraient appris la leçon. Mais force est de constater que cela ne leur a pas servi de leçon.

 

Q : Mais parlons-nous de cette bataille médiatique…

R : En ce qui concerne la bataille médiatique, tel que vous l’appelez, c’est le MMM qui l’a commencée et nous l’avons simplement conclue !

Ayant eu vent que notre congrès annuel des jeunes se tiendrait le même jour que leur congrès national d’anniversaire et peut-être aussi en craignant que le succès de notre congrès ne leur fasse de l’ombre, ils ont alors fait leur con en publiant une vidéo de bas étage centrée autour d’attaques personnelles contre le PMSD. En réponse, nous avons, nous aussi, publié une vidéo par la suite intitulée ‘Mari Mové Massacre’ qui reprend les moments forts de la trahison de Bérenger et de son parti envers ses militants qui avait pour unique but de satisfaire les intérêts personnels de ses dirigeants et surtout ceux de son leader. Il est important de souligner que notre vidéo a recueilli plus de 70 000 vues contre 20 000 pour celle du MMM. Nous avions également, au même moment, publié une vidéo mettant en avant les jeunes du PMSD et expliquant la raison pour laquelle ils ont choisi de militer pour le parti de bleus. Elle s’intitule “Le PMSD parce que” et elle aussi a  recueilli 70 000 vues. Il est clair que le MMM ne fait le poids ni sur le terrain ni sur les réseaux sociaux contre le PMSD 2.0. Cela ne nous surprend pas ! Est-ce que vous rappelez-vous de ce que Paul Bérenger avait dit de Facebook ?

  • « Heritage City : Ce n’est pas une priorité pour moi. Il faut avant tout honorer le contrat que nous avons signé avec le peuple, c-à-d réaliser les mesures énoncées dans le manifeste électoral 2014-2019 »

 

Q : La démission du Dr Zouberr Joomaye, qui est intervenue à la veille du 47ème anniversaire du MMM, fait-elle le jeu du PMSD qui a organisé, le même jour, un congrès à Ébène ?

R : Il est clair que la démission du Dr Zouberr Joomaye est intervenue au pire moment possible pour le MMM. Il faut rappeler que c’est la première fois, depuis sa défaite en 2014, que le MMM a trouvé le courage d’organiser un rassemblement politique hormis leurs fameuses ‘journées de réflexion’ qui étaient organisées pour se sauver la face en raison de son manque de confiance en sa capacité de mobiliser ses militants. Le congrès du MMM était peu spectaculaire malgré les efforts que certains ont faits pour faire croire que la foule présente représentait une véritable marée! Le MMM a recueilli, au grand maximum, 2 000 personnes pour son congrès national à l’occasion de son 47ème anniversaire à Octave Wiehe. Quoi qu’il en soit, les dirigeants de ce parti savent que le MMM est au plus bas et que l’heure est grave. Rappelez-vous la fable du bœuf et de la grenouille ! On peut se gonfler et se prétendre plus grand et plus fort qu’on ne l’est vraiment, mais la vérité finit toujours par éclater un jour ou l’autre. Vous le verrez…

Le MMM se dirige tout droit vers l’implosion s’il continue d’appliquer une politique passéiste et dépassée à contre-courant des désirs de changement et d’appliquer ses pratiques politiques rétrogrades. Il s’avère éloquent que le plus jeune député du MMM ait aujourd’hui démissionné du parti et que le bruit court que celui qui est aujourd’hui devenu le plus jeune député avec la démission du Dr Joomaye, s’apprête à partir lui aussi.

Le PMSD a, quant à lui, organisé le même jour, et cela avec un énorme succès, son congrès annuel des jeunes qui a recueilli une participation de plus 9 000 jeunes du PMSD démontrant un enthousiasme hors du commun. Je salue d’ailleurs tous les jeunes qui ont fait le sacrifice de se réveiller un dimanche matin à 7 heures pour soutenir le PMSD. Cela démontre finalement que les jeunes sont bel et bien interpelés par la politique et qu’ils n’hésitent pas à participer lorsqu’un parti qui leur donne toute leur place et qui reflète leurs convictions par ses actions, fait appel à eux.

En ce qui concerne les retombées de cette démission pour notre parti, je suis certain que les militants du MMM, qui réalisent aujourd’hui que le MMM ne représente plus l’avenir et qu’il est dépassé, sauront trouver leur place au sein du PMSD. Nous les invitons à nous rejoindre et nous leur ouvrons les bras bien grands.

  • «  Le MMM se dirige tout droit vers l’implosion s’il continue d’appliquer une politique passéiste et dépassée »

 

Q : Est-ce normal, selon vous, qu’il y ait autant de tiraillements entre les membres du gouvernement ?

R : Non, ce n’est pas normal. Les règlements de comptes doivent être réglés au Conseil des ministres et au sein du Groupe Parlementaire de l’Alliance Lepep et non dans les médias. J’espère que cela va s’arrêter. Cela projette une mauvaise image pour le pays et nous aurions pu nous en passer.

 

Q : Que vous inspire un éventuel ‘revival’ du projet Heritage City ?

R : Ce n’est pas une priorité pour moi. Il faut, avant tout, honorer le contrat que nous avons signé avec le peuple, c’est-à-dire réaliser les mesures énoncées dans le manifeste électoral 2014-2019.

Q : Le gouvernement a signifié son intention d’aller de l’avant avec le projet de réforme de pension. Quelle est votre opinion à ce sujet ?

R : Il était temps. Il est inquiétant de constater que nous avons aujourd’hui une population vieillissante. Maurice ne possédant pas d’autres ressources que son capital humain, cela veut donc dire que notre seule ressource naturelle est en décroissance.

D’après les prévisions du Fonds Monétaire International, la tranche de la population mauricienne âgée de plus de 60 ans, qui représente aujourd’hui 13% de la population totale, passera à 30% en 2050. C’est notre modèle même de ‘welfare state’ qui est aujourd’hui menacé.

Le vieillissement de notre population veut dire qu’à l’avenir, le nombre de contributeurs au fonds de pension baissera alors que le nombre de bénéficiaires d’allocations de retraite augmentera. L’Etat devra donc se charger continuellement de combler le déficit du fonds de pensions qui ne cessera de s’agrandir. Où est-ce que l’État trouvera cet argent ? Il est inévitable que les fonds destinés à être employés à d’autres fins, par exemple ceux destinés à l’amélioration de nos infrastructures, devront être utilisés à cet effet.  Vous voyez bien le problème auquel notre pays fait face aujourd’hui. Une réforme de notre système de pensions est aujourd’hui inévitable.

Le gouvernement travaille déjà sur la question. Un comité de haut niveau, regroupant plusieurs ministères, a déjà été institué.

À mon avis, nous devons sérieusement étudier la possibilité de revoir à la hausse l’âge de la retraite. La France, qui fait face au même problème, n’a eu d’autre choix que de prendre cette décision en 2010. Il est toutefois trop tôt pour se prononcer. Attendons les recommandations du comité pour avoir une meilleure compréhension de la situation.

 

Q : En tant qu’avocat, que pensez-vous du système judiciaire mauricien ?

R : Le judiciaire est le garant de l’État de droit de notre pays. Il est et devra toujours être complètement indépendant et j’ai entièrement confiance en son indépendance.

 

Q : Beaucoup d’observateurs politiques estiment que chaque parti politique doit aller seul aux prochaines élections générales. Partagez-vous leur avis ?

R : Peut-il vraiment le faire ? Est-ce qu’un parti à Maurice peut, à lui seul, remporter les élections aujourd’hui? Je ne le crois pas car, en prenant en compte les considérations communautaristes, la réalité mauricienne l’empêche encore.  Cela changera un jour, car les jeunes pensent de moins en moins en terme de communautarisme mais de plus en plus en terme de convictions. Je n’ai aucun doute que, si un jour un parti réussi à le faire, ce sera le PMSD.

 

Q : Quelle est l’ultime ambition d’Adrien Duval en tant que politicien ?

R : Avoir de l’ambition, c’est croire en un avenir meilleur. Mon ambition à moi, et la raison pour laquelle je fais la politique, est d’apporter des changements profonds à notre pays afin d’instaurer une vraie culture de la méritocratie et de l’égalité des chances, où chaque Mauricien se voit juger selon ses talents personnels et non selon d’autres critères qui n’ont, aujourd’hui, plus leur place dans notre société moderne. Je crois profondément que ces changements se réaliseront uniquement lorsque le PMSD disposera des pouvoirs nécessaires afin d’appliquer entièrement son manifeste et sa vision, et je suis convaincu que ce jour viendra sous le leadership de Xavier-Luc Duval.