Infrastructures et propreté : Nos hôpitaux malades !

Ici se trouve le « Mess » des chauffeurs du SAMU. L’état dans lequel se trouve ce bâtiment en tôle démotive les chauffeurs de ce service. Cela va sans dire que quand il pleut, les lieux se transforment en véritable passoire.

Infrastructures cassées, délabrées, dépassées, chiens errants, des déchets remplis de bactéries qui traînent dans la cour, toilettes nauséabondes… bref la liste peut être encore plus longue.  En 2018, alors que le gouvernement veut assurer une qualité de service impeccable aux patients dans nos hôpitaux régionaux,  au niveau des infrastructures et des conditions d’hygiène, un long chemin reste à parcourir. L’hôpital du Nord, l’hôpital Dr. Jeetoo, l’hôpital Victoria ou encore celui de Flacq… Nous sommes cette semaine partis à la découverte de nos hôpitaux pour un survol des conditions. Le bilan de santé de nos hôpitaux est alarmant.

Marwan Dawood/Chitanjal Goolaup

Hôpital de Flacq : l’enfant pauvre

Depuis des années maintenant, la construction d’un nouvel hôpital à Flacq est devenue une nécessité. Cependant, en dépit de la volonté affichée, nous sommes toujours en attente des démarches pour obtenir un hôpital neuf. Aux dernières nouvelles, le financement a été en partie obtenu mais les démarches pour faire l’acquisition d’un terrain à Flacq, de préférence dans la région de Constance, se font également attendre. Nous y étions au courant de la semaine, et les problèmes d’ordre infrastructurel ne manquent pas.

 

À commencer par l’aire de stationnement. Avec les changements démographiques qu’a connus la région, l’hôpital de Flacq est de plus en plus fréquenté. Hélas, il y a aussi le fait que plusieurs services manquent à l’appel. L’hôpital de Flacq n’a actuellement ni CT Scan ni appareil pour l’imagerie par résonance magnétique (MRI).  Les patients sont par conséquent référés à l’hôpital du Nord ou à celui de Victoria à Candos pour les examens appropriés.

Cette salle d’attente extérieure ressemble de près au « Mess » plus haut. De nombreux patients se plaignent du fait que quand il y a de la pluie, ils sont trempés.

 

On est dans le couloir d’attente en face des salles de consultation. Comme ailleurs, nous avons ici également le même problème. Ils sont nombreux à attendre dans un lieu mal aéré, sombre et malodorant.

 

Une fois de plus, les mêmes soucis. Ici, dans le bloc où se trouvent les salles d’admission. L’eau de pluie a quitté ses traces.

 

Équipements : les laboratoires ont « 20 ans de retard »

Si l’on note des progrès au niveau des ressources humaines, c’est une autre histoire à l’échelle des équipements. Certains dysfonctionnements sont encore bel et bien présents, notamment dans les laboratoires. « Nous avons au moins 20 ans de retard au niveau de nos laboratoires », révèle un employé de longue date dans ce secteur. La preuve est qu’à Maurice, nous ne faisons toujours pas d’analyses moléculaires et génétiques. En fait, les analyses moléculaires se limitent à des dépistages pour l’hépatite. Pour certains cas de cancer, les laboratoires des hôpitaux mauriciens ne sont pas capables de déterminer le type exact du cancer. Des manquements qui disqualifient Maurice comme un potentiel ‘Medical Hub’.

Hôpital du Nord : de graves manquements au niveau du ‘Health & Safety’

Outre les laboratoires, les infrastructures sont elles-mêmes dans un piteux état. L’immeuble de l’hôpital du Nord date de 1968 et aucun projet de rénovation à l’horizon. Les lits datent de l’époque anglaise et les trolleys de 1968. Certains bâtiments comportent de graves manquements au niveau du ‘Health & Safety’.

À l’hôpital du Nord, une impasse menant vers le couloir, près de la morgue, s’est transformée en véritable dépotoir. Des gants, des calottes médicales bleues, ainsi qu’un tas de mégots, traînent au sol.

 

Au Casualty, les longues files d’attentes, le manque de fauteuils roulants, les civières dégarnies et le personnel impoli, qui passe beaucoup de son temps à bavarder entre collègues : de quoi rendre plus malades les patients, qui doivent prendre leur mal en patience…

Les toilettes sales qui puent l’urine, et jugés trop dangereux à utiliser à cause des risques d’infections. L’aspect sanitaire ne semble nullement s’être amélioré.

L’hôpital Dr. Jeetoo : plusieurs insuffisances

 

À l’hôpital Dr. Jeetoo, les salles de bain des patients sont souvent inondées, et posent le risque d’une mauvaise chute.

Depuis pratiquement cinq mois, les ascenseurs sont sources d’inconvénients aux patients et aux visiteurs car deux des ascenseurs sont toujours en panne. Au début du mois de juillet, quatre des ascenseurs ont été vandalisés et ont nécessité des réparations. Deux personnes, un père et son fils, se sont même retrouvées bloquées à l’intérieur.

 

Pourquoi les hôpitaux sont sales ?

Pour plusieurs professionnels de la Santé, pendant des décennies, le gouvernement, par l’entremise du ministère de la Santé persiste à allouer les contrats de maintenance au soumissionnaire le plus bas et cette pratique serait néfaste. Certaines personnes estiment qu’au niveau des équipements, il y va aussi de la responsabilité du directeur des services, qui doit rechercher la modernisation.

L’aveu d’Anwar Husnoo

« Le manque de propreté et d’entretien est un problème général au niveau des hôpitaux publics », un aveu de taille signé Anwar Husnoo, qui répondait à la Private Notice Question du mardi 13 novembre, axée sur le service de dialyse dans les hôpitaux. Dans sa réponse, le ministre de la Santé affirme travailler activement pour améliorer le niveau d’hygiène. Une réorganisation des services est en cours afin d’y remédier, a tenu à  rassurer le Dr. Anwar Husnoo.

Une première lors d’une PNQ, le leader de l’Opposition, Xavier Duval, a produit des photos démontrant l’état déplorable des toilettes de l’hôpital Sir Seewoosagur Ramgoolam, où il s’était rendu le matin. Ce qui peut provoquer des infections chez les patients, a fait remarquer le leader de l’opposition.

« Je sais qu’il y a un problème de propreté dans les hôpitaux», a reconnu Anwar Husnoo. Qui a cependant pris la mouche lorsque le leader du PMSD l’a piqué à vif à plusieurs reprises sur le budget dont il dispose. Le ministre devrait pouvoir allouer « quelques centaines de roupies», a ironisé Duval, pour acheter du papier hygiénique ou encore remplacer les climatiseurs. En exigeant que Husnoo s’excuse auprès des patients. « Quand vous étiez ministre des Finances, avez-vous donné de l’argent pour du papier hygiénique ? », a rétorqué le ministre de la Santé.