Halte à la provocation !

Ce qui s’est passé à Vallée Pitot hier est inacceptable et condamnable. Pour quelles raisons la police a-t-elle choisi d’y faire une reconstitution des faits un samedi matin quand les rues y sont animées ? Une démarche inouïe quand on sait que la tension y est palpable depuis que des policiers armés jusqu’aux dents y ont presque élu domicile. On n’a cessé de tirer la sonnette d’alarme sur la façon de procéder de la police dans l’affaire Fakhoo. Des députés et des avocats ont élevé leurs voix. Des habitants et des travailleurs sociaux ont dénoncé les opérations musclées incessantes dans cette région port-louisienne. Des proches des suspects ont fait état de doutes et d’interrogations entourant toute cette sombre affaire. En vain. La police a persisté à faire la sourde oreille et a maintenu ses déploiements réguliers frisant l’incompréhension la plus totale à la rue Alma.

La police, de par sa façon d’opérer, semble avoir privilégié la provocation et la confrontation au lieu de l’apaisement. Ce qui ne pouvait évidemment que culminer par les affrontements qu’on a vus hier et qui se sont soldés par des coups de gaz lacrymogène par la police. Des heurts non sans conséquences. Outre des dégâts matériels, des habitants innocents et inoffensifs, dont un bébé de quatre jours, ont dû être hospitalisés. Pourquoi la police a-t-elle jugé utile de se servir du gaz lacrymogène alors que les habitants ne faisaient que protester verbalement contre l’invasion persistante des effectifs de la police dans ce quartier où règne désormais une tension constante ?

Imaginez pour un instant l’angoisse de cette maman qui, au lieu de pouvoir se remettre de son accouchement, doit maintenant rester au chevet de son nouveau-né mis sous observation à l’hôpital à cause de l’insensibilité de la police ! Et dire que cette situation aurait pu être évitée si les forces de l’ordre avaient montré plus de tact et de raisonnement dans un contexte où le pays traverse déjà par des moments difficiles, exacerbé par des tensions communales, surtout depuis la démonstration pompeuse de sabres en plastique au nez et à la barbe des autorités et de l’agression d’Okeeb pour ne citer que ceux-là.

La police a le devoir de maintenir l’ordre et la paix dans le pays. Elle doit aussi s’assurer qu’il n’y ait pas de dérapages. Or, quand elle fait preuve d’excès de zèle, cela mène inévitablement à la méfiance et à l’indignation publique. Il incombe au Commissaire de police de prendre les choses en main et de venir s’expliquer sur les raisons de cet acharnement apparent de son équipe contre des familles qui ne cherchent, elles aussi, que de connaître la vérité concernant le meurtre de Manan Fakhoo. Les proches de ceux inculpés, que ces derniers soient coupables ou pas, se retrouvent déjà dans la tourmente. À quoi cela sert-il de les antagoniser davantage ? Pourquoi ces descentes inlassables ? Khemraj Servansing nous doit des réponses.

Ce dernier a également la responsabilité de veiller de près à ce que l’affaire Fakhoo ne prenne pas des tournures communales et qui risquent de fragiliser le tissu social. Il ne faut pas non plus que la police donne l’impression qu’elle n’agisse que dans ce cas précis dans le but de détourner l’attention publique alors qu’il y a d’autres enquêtes tout aussi pressantes en cours. Pourquoi déployer les grands moyens sur une affaire spécifique tandis qu’il y a divers dossiers liés aux scandales du gouvernement qui dorment dans les tiroirs des Casernes centrales ? Nous ne sommes pas contre la justice. Au contraire. Mais la justice doit être la même pour tout le monde. Qu’il soit criminel, simple citoyen, policier, ex-Commissaire de police ou ministre.