Gratuité des manuels scolaires : Ces livres institutionnalisent-ils une certaine médiocrité parmi les élèves ?

Le gouvernement actuel a annoncé qu’il compte fournir aux collégiens des grades 7 à 9 les manuels scolaires gratuitement. Une mesure qui a été très bien accueillie par les parents, certes, qui les allège des dépenses liées à l’achat livres. Qu’en est-il des enseignants ? Nous avons fait le tour de la question avec Vishal Singh Balluck, un enseignant en langues  comptant une quinzaine d’années d’expérience dans un collège des Plaines-Wilhems. Ce dernier explique que les manuels du MIE sont loin d’être adéquats, et institutionnalisent une éducation médiocre.  

Vishal Singh Balluck aborde la question de la qualité de l’éducation qu’offrent ces manuels gratuits. Il nous le dit sans ambages : « Les livres du MIE ne servent pas à grand-chose ! Ils sont loin de suffire pour l’année académique et ne sont absolument pas adéquats pour que les apprenants sortent avec un niveau même moyen.»

Vishal Singh Balluck affirme toutefois qu’il salue l’effort et le travail des pédagogues qui écrivent les manuels du MIE.

« Beaucoup de mes collègues vous diront la même chose, peut-être pas haut et fort, mais ils sont d’accord avec moi sur ce point. Tout comme moi, je sais que beaucoup de profs de langues éprouvent d’énormes difficultés à utiliser ces manuels car leur contenu n’est pas à la hauteur de l’éducation que nous voulons dispenser à nos élèves. »  Selon cet enseignant, « Nous ne pouvons nous permettre cette dérive où les apprenants, au lieu de tenter d’exceller, se contentent de leur performance qui frise la médiocrité. »

En revenant sur les manuels, il nous fournit un exemple : si un enseignant veut faire un exercice dit de ‘compréhension’ à partir des manuels des Grades 7 et 8 du MIE, que ce soit pour le français ou l’anglais, il ne pourra carrément pas le faire. Il lui faudra absolument avoir recours à des ‘workbooks’ ou à d’autres manuels, autres que ceux du MIE.

Il décrit aussi l’absence de certains mots techniques des manuels du MIE. « L’apprentissage des langues exige certains mots techniques, qui sont malheureusement absents des manuels du MIE. Or, nos enfants doivent savoir les différentes composantes de la grammaire pour qu’ils puissent écrire convenablement », souligne l’enseignant.

Il nous raconte une anecdote qui laisse un peu deviner l’état d’esprit des personnes qui sont derrière le projet de manuels offerts gratuitement. « Je me souviens d’une dame (une cadre supérieure) qui m’avait convoqué à la suite de sa visite dans ma classe de Grade 8 pour me conseiller de ne pas utiliser le terme ‘adjectif qualificatif’ pour faire ma classe, qui était sur… l’adjectif qualificatif ! », nous dit l’enseignant, sidéré par cette expérience.

« S’il faut offrir les livres gratuitement aux élèves, qu’on leur offre des livres qui en valent vraiment la peine », fait ressortir notre interlocuteur.