Géraldine Aliphon, un combat perpétuel pour les enfants autistes

Géraldine Aliphon, 40 ans, habitant Crève-Cœur, est une figure incontournable dans le combat contre l’autisme à Maurice. Mère de deux enfants, dont l’un est autiste, elle n’a jamais baissé les bras et a créé une association, pour offrir une éducation spécialisée aux enfants atteints de ce handicap, et pour réunir leurs parents au sein de l’association. Aujourd’hui directrice de l’association Autisme Maurice, elle nous livre son parcours.

Nous l’avons rencontrée quelques jours avant la Journée mondiale de l’Autisme, qui est célébrée aujourd’hui, soit le 2 avril. Cette journée est très spéciale pour cette quinquagénaire qui veut apporter plus de changements dans notre approche de l’autisme à Maurice. Bien qu’elle soit la mère d’un enfant autiste, Evans, âgé de 12 ans, Géraldine a toujours encouragé son épanouissement. Elle veut que chaque enfant autiste soit valorisé, tout autant qu’un enfant normal.

Son monde a basculé le jour où elle constate que son fils, alors âgé de 15 mois, avait tout d’un coup changé de comportement. « Les jouets ne l’intéressaient plus et il était devenu très tranquille et indifférent. Il pleurait tout le temps et restait hyperactif  », nous explique-t-elle. D’ailleurs, ce sont des signes démontrés par la plupart des enfants autistes.

 

L’autisme : quand l’enfant est replié sur lui-même

Ils sont en retard dans leur développement, souffrent des troubles de langage et de comportement et ont des difficultés à socialiser avec leur entourage. Si certains arrivent à parler correctement, 70 % des autistes sont décrits comme étant non-verbaux, c’est-à-dire qu’ils ne parlent presque pas ou leurs propos ne sont pas cohérents. Parfois, ils sont hypersensibles aux bruits et parfois, complètement indifférents au son. Surtout, ils ont des difficultés à s’adapter aux changements. « Ils sont très angoissés dès que le moindre petit changement est apporté à leur quotidien. Certains ont des troubles sensoriels et n’arrivent pas à discerner les sentiments chez autrui ni à lire les expressions du visage », explique-t-elle.

Géraldine tombera sur une revue pour enfant, qui la fera réaliser qu’Evans montre des signes d’autisme. Pour avoir une confirmation, Géraldine emmènera son fils faire des tests d’évaluation par une psychologue suisse de passage à Maurice, ainsi que par un médecin de l’APEIM. Les diagnostics de ces derniers sont positifs : Evans est atteint d’autisme.

Géraldine réussira tant bien que mal à inscrire son enfant dans une école maternelle normale jusqu’à ses cinq ans. « Des recherches ont démontré que plus un enfant atteint d’autisme est exposé dans un milieu normal, il prendra moins de temps à s’adapter », affirme-t-elle. Mais l’école décide de ne plus garder Evans, ne pouvant plus le surveiller et le prendre en charge.

De son côté, la mère de ce dernier se documente sur le sujet et fait la rencontre d’une autre mère dont l’enfant souffre du même handicap. En novembre 2007, ensemble, elles lancent officiellement l’association Autisme Maurice.

 

Maurice très en retard par rapport à l’autisme

Elles seront invitées à assister à une conférence de deux jours sur le sujet à la Réunion. Géraldine sera surprise quand elle réalisera que l’île sœur a 20 ans d’avance sur Maurice en ce qui concerne l’autisme. Pendant cette conférence, elle fera la connaissance de Nathalie Faucher, qui gère l’association Autisme Réunion. Cette Réunionnaise apportera par la suite son expertise dans la lutte contre l’autisme à Maurice.

Elle fera venir des éducateurs spécialisés réunionnais au pays et assurera la formation des parents. À ce jour, Autisme Réunion continue à aider Autisme Maurice et ses membres font même le déplacement chaque année pour faire un suivi de la situation. En outre, l’association a conclu un accord avec le gouvernement mauricien pour étendre ses formations aux autres associations afin de toucher plus de Mauriciens.

À travers son association, Géraldine regroupe des autistes en leur offrant une éducation spécialisée, sensibilise les Mauriciens sur ce handicap et assure parallèlement la formation des parents. Ils sont une centaine de parents et 38 élèves à bénéficier du support d’Autisme Maurice. Avec l’aide des volontaires, elle a aménagé six salles de classe qui sont réparties en trois endroits, à savoir Quatre-Bornes, Notre Dame et Rose-Hill.

 

Un petit autiste peut aspirer à une existence normale

Les enfants qui fréquentent Autisme Maurice ont droit à une éducation spécialisée, conçue pour les autistes, et adaptée individuellement à chaque élève à travers un Individual Educational Programme (IEP). Cette pédagogie est mise en place par une équipe de professionnels, composée de psychologues, de thérapeutes et d’éducateurs. Ici, les bénéficiaires apprennent à dépendre d’eux-mêmes et sont exposés à des gestes quotidiens de base, comme se brosser les dents ou se baigner sans l’aide de personne. Ils sont aussi initiés à l’équitation à travers la horse riding therapy et s’occupent du toilettage des chevaux. Elle précise toutefois que ces enfants ont besoin d’une surveillance continue. « Je dois surveiller mon fils chaque 5 minutes pour voir ce qu’il est en train de faire. S’il fait du bruit, c’est bien mais par contre, s’il est silencieux, cela veut dire qu’il est en train de concocter quelque chose », explique cette mère.

Géraldine Aliphon voit plus grand. Cette habitante de Crève-Cœur encourage les parents à s’impliquer plus dans l’éducation de leurs progénitures. Elle demande aussi à ce que l’État investisse davantage dans l’éducation des handicapés au même titre que pour les enfants dits normaux. « Mon fils est un citoyen de ce pays, il a droit à une éducation de qualité », souligne-t-elle. Pour elle, c’est inacceptable qu’un pays comme Maurice, qui investit autant dans les développements infrastructurels, n’investisse pas dans l’éducation des enfants handicapés.

Valeur du jour, on ne peut que déplorer l’absence de toute statistique sur le nombre d’enfants atteints d’autisme à Maurice. En extrapolant sur les chiffres de l’Organisation mondiale de la Santé, selon lesquels 1 % de la population mondiale souffre d’autisme, on arriverait à environ 11 000 personnes à Maurice qui souffriraient de ce handicap.

 

Si vous pensez que votre enfant souffre d’autisme, vous pouvez l’emmener à Autisme-Maurice pour une évaluation et des conseils. Veuillez téléphoner au 465-3120 pendant les heures de bureau.