Fourniture de Zidovudine à la Santé en fin 2019 : Catherine Gaud avait-elle agi comme courtière auprès de la Santé ?

  • Son ingérence et implication directe dans le traitement des patients, tout comme ses directives au personnel soignant, dénoncées, n’étant pas enregistrée au ‘Medical Council

 

  •  Le Dr Purmessur : « Accès aux dossiers pas autorisé en cas de non-enregistrement…»

 

A-t-elle déjà agi comme ‘courtière’ pour le ministère de la Santé avant son recrutement comme ‘Senior Adviser’ ? C’est la question que le député Eshan Juman voulait poser au ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, à l’Assemblée nationale, mardi. Or, cette question supplémentaire a été tout bonnement rejetée par le Speaker qui jouait au ‘goalkeeper’ du gouvernement comme à l’accoutumée. Mais ce n’était que partie remise puisque la vérité finit toujours par faire surface. Il s’avère ainsi que la doctoresse Catherine Gaud, qui est venue au-devant de la scène depuis le début de la pandémie Covid-19 chez nous, n’est pas une étrangère au ministère de la Santé, ayant déjà agi comme intermédiaire pour la fourniture de certains médicaments à nos services médicaux.

En effet, selon une correspondance datée du 20 novembre 2019 et adressée par le ‘Principal Pharmacist’ de la ‘Procurement Unit’ au Dr Soyjaudah, ‘Head National Aids Secretariat’, il est question des difficultés auxquels faisait face ce département pour se procurer des injections de Zidovudine 10 mg. Aucune offre n’avait été reçue, semble-t-il, pour la fourniture de ce médicament utilisé lors des accouchements pour éviter la transmission du sida de la mère au bébé. C’est là que Catherine Gaud entre en jeu. C’est elle seule qui pouvait apparemment aider le ministère à obtenir ce médicament qui n’a pas de substitut. « I would be grateful if you could kindly contact Dr Catherine Gaud from Réunion Island to procure one hundred (100) vials of Zidovudine 10 mg Injections from Réunion Island or from Madagascar or from France if possible », exhorte le ‘Principal Pharmacist’.

C’est une vingtaine de jours plus tard, plus précisément le 11 décembre 2019, que le Dr Soyjaudah se tournera vers le ‘Senior Chief Executive’ du ministère de la Santé pour lui demander son autorisation pour que la fourniture du « IV Zidovudine be authorized through Dr Catherine Gaud, HIV expert who has been working at the Centre Hospitalier Universitaire, Belle Pierre, Réunion Island. Dr Gaud could facilitate the procurement of item IV Zidovudine from Réunion Island (see annex 2 ». À ce qu’il paraît, les bons offices de Catherine Gaud se seraient finalement révélés fructueux. Difficile de dire en quelle capacité et sous quelles conditions elle a accepté d’intervenir en faveur de la Santé. L’avait-elle fait gratuitement ou a-t-elle perçu des commissions ? Aucun élément de réponse à ce stade.

Pour rappel, le ministre Kailesh Jagutpal a souligné, durant sa réponse initiale à Eshan Juman, que Catherine Gaud a été recrutée comme ‘Senior Adviser’ à la Santé en avril dernier en raison de sa grande expertise. L’on ne sait pas toutefois si c’est cette même grande expertise qui pousse souvent Catherine Gaud à se contredire, comme sur le cas de cette femme en quarantaine qui avait été autorisée à assister à l’enterrement d’un proche. « On a fait cet effort pour cette personne. Donc, maintenant on pourra éventuellement au cas par cas, refaire la même chose si d’autres situations très dramatiques se produisent pour d’autres personnes », avait-elle dit sur les ondes d’une radio privée le 20 octobre avant de revenir sur cette décision deux jours plus tard, soit le 22 octobre, en expliquant que plus personne en quarantaine ne serait autorisé à assister aux funérailles. Toujours est-il que le gouvernement semble ne jurer que par elle en matière de santé publique, vu le nombre impressionnant de responsabilités qu’elle a été confiée. De quoi faire pâlir le ministre de la Santé lui-même…

 

Traitement et directives au personnel soignant

Son implication directe dénoncée

Bien que Catherine Gaud ne soit pas enregistrée auprès du ‘Medical Council’ et qu’elle n’a pas le droit d’exercer comme médecin, dans les couloirs du ministère de la Santé, on lui reproche de fourrer son nez dans le dossier des patients, de superviser les traitements et de donner parfois des directives au personnel soignant alors qu’elle n’en a officiellement pas le droit. En tant que conseillère au ministre de la Santé ou même au gouvernement, nous explique une source bien informée, elle ne peut qu’aviser sur la stratégie à adopter.

« Elle ne peut en aucun cas voir les dossiers des patients ou donner des directives aux médecins, comme elle le fait. Elle n’a qu’à donner des conseils au ministère et, une fois consentis et approuvés, c’est aux officiers et au personnel soignant de s’assurer que les directives et les protocoles mis en place soient appliqués et respectés à la lettre », poursuit notre source.

Celle-ci ne manque pas de dresser un parallèle avec le Dr Zouberr Joomaye. Ce dernier est également conseiller et membre du comité national sur la Covid-19, mais il ne s’en tiendrait qu’à son rôle et ne transgresserait pas ses limites en donnant des directives directes au personnel du ministère de la Santé ou au personnel soignant, nous dit-on. Pourtant, le Dr Joomaye est, lui, bel et bien enregistré au ‘Medical Council’.

Que dit l’instance régulatrice qu’est le ‘Medical Council’ à ce sujet ? Le Dr Shyam Nundun Singh Purmessur est catégorique. « Dans le secteur public, une personne qui n’est pas enregistrée au Medical Council peut émettre son avis ou faire du ‘counselling’, mais elle n’a pas droit d’avoir accès aux documents ou aux dossiers. Les règlements sont clairs à ce sujet. D’ailleurs, si le ‘Medical Council’ reçoit une plainte officielle en bonne et due forme, et non une lettre anonyme, contre un cas d’‘illegal practice of medicine’, le board pourra enquêter. Toutes les procédures seront suivies à la lettre », souligne le président de l’organisme.

Pourquoi Catherine Gaud se permet-elle de violer les règles ? Est-elle au-dessus de la loi ? Le gouvernement devra répondre…

 

Salaires et allocations de Rs 852 000 jusqu’ici

Catherine Gaud bénéficie d’un salaire mensuel de Rs 120 000, une allocation de Rs 20 000 ainsi qu’une autre allocation de téléphone de Rs 2000. Depuis sa nomination le 19 avril 2019, la conseillère a donc touché des salaires s’élevant à Rs 720 000 et des allocations de Rs 132 000. Ce qui fait un total de Rs 852 000 pour les six mois qu’elle a servi le gouvernement. Une voiture officielle et un chauffeur sont aussi mis à sa disposition. Elle a aussi droit à un ‘passage benefit’ de 5% de son salaire annuel et deux mois de gratuité après un an de service.