Enquêtes trompe-œil

La reprise des travaux parlementaires, prévue pour ce mardi, est très attendue. Les scandales et les sujets qui préoccupent ne manquant pas, l’Opposition aura, selon toute évidence, du pain sur la planche. Elle devra faire feu de tout bois si elle ne veut pas donner l’impression qu’elle est amorphe. D’autant qu’elle aura en face d’elle un gouvernement qui ne semble pas vouloir changer son style de gouverner, malgré qu’il ait été acculé politiquement par les récentes marches citoyennes. D’ailleurs, le gouvernement semble avoir bien peaufiné sa stratégie.

Pravind Jugnauth pourra facilement écarter toute interpellation sur l’affaire Angus Road en prétextant que l’ICAC enquête. Il en est de même pour le scandale de l’achat d’équipements médicaux et de médicaments durant le confinement. L’Opposition devra ainsi lui tirer les vers du nez si elle veut vraiment obtenir des réponses dans l’intérêt public. Tâche herculéenne quand on connait déjà les tactiques auxquelles les ministres ont généralement recours pour éviter de rendre des comptes.

Le manque d’indépendance de l’ICAC est connu de tous. Raison pour laquelle les récentes arrestations dans le sillage de l’enquête sur l’achat des équipements médicaux n’emballent personne. On sait tous comment cette enquête va terminer, probablement dans le fond d’un sombre tiroir au Réduit Triangle. Comme l’a été l’enquête qu’elle avait initiée sur l’affaire Angus Road. Ou encore celle sur l’affaire Saint Louis qui semble avoir été reléguée aux oubliettes après quelques arrestations trompe-œil.

L’ancien ‘Deputy Prime Minister’, Ivan Collendavelloo, peut entretemps dormir sur ses deux oreilles, comme il le faisait si souvent lors des fonctions, diront les mauvaises langues, en attendant sa convocation, pourtant annoncée depuis le début d’octobre. Puisqu’il en est ainsi pour le petit Caporal, pourquoi devrait-il en être différent pour le bon Dr Joomaye ? Qui pourra nous blâmer si l’on prend avec une pincette son éventuelle convocation par la commission anti-corruption ? Surtout quand il n’a pas été le moindrement inquiété jusqu’ici dans l’autre enquête initiée par l’ICAC contre lui après qu’il ait bénéficié d’un terrain à Coromandel pour la construction d’une clinique.

Il faut être vraiment dupe pour croire que l’ICAC ira jusqu’au bout de ses enquêtes contre les proches du pouvoir. Elle ne sert que de paravent pour détourner l’attention publique. Et ce sont presque toujours les sbires qui sont envoyés à la guillotine alors que les protégés se la coulent douce. N’empêche que ces prétendues investigations serviront de prétexte au gouvernement, surtout au Premier ministre, pour faire croire qu’il ne joue pas sur le dossier de la corruption. Tout comme il prétend combattre la drogue alors que les trafiquants ne sont jamais arrêtés.

Tout comme l’ICAC n’a plus de crédibilité, un bouledogue sans dents comme dirait l’autre, le Premier ministre risque lui aussi d’en perdre le peu qu’il lui reste toujours. Qu’il ne vienne pas alors demander « kot mone fauter » !