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Rita Venkatasawmy : « Le droit de visite des parents est un droit fondamental »

Durant notre dernière édition, nous avions évoqué le cas de Mme Booyjonauth, dont quatre de ses enfants ont été pris en charge par la Child Development Unit (CDU) en décembre dernier. Apparemment soupçonnée à tort de maltraitance, dévastée, cette mère n’a pas le droit de visiter ses enfants. La CDU prend-elle en charge les enfants de façon trop brusque, sans mener une enquête ? Respecte-t-elle le droit de visite des parents, qui est un droit garanti sous la Convention internationale sur les droits des enfants ? Nous faisons le point sur la question avec Rita Venkatasawmy, l’Ombudsperson for Children, la députée Stéphanie Anquetil (PTr), et le travailleur social Ally Jookhun.

Rita Venkatasawmy, l’Ombudsperson for Children, nous déclare que le droit de visite des parents est un droit fondamental, en conformité avec la Convention internationale des droits des enfants, qui stipule qu’il fait maintenir un lien entre les parents et l’enfant. Par contre, cela ne s’applique pas si l’enfant est à risque quand il rencontre ses parents, qui peuvent être ceux qui abusent de l’enfant. Ce dernier pourra être traumatisé. De ce fait, il y a des circonstances où la CDU ne va pas laisser l’enfant rencontrer ses parents. « Les enfants sont parfois traumatisés à la vue du parent abuseur et ce n’est donc pas dans l’intérêt de l’enfant de rencontrer le parent. C’est le psychologue de l’institution qui doit faire un travail avec l’enfant, pour que ce dernier puisse rencontrer son parent dans un environnement protégé », souligne notre interlocutrice.

Selon cette dernière, le principe est que le lien avec le père ou la mère biologique, ou encore avec les grands-parents biologiques, doit être maintenu. Elle insiste sur le respect de ce principe, même dans des circonstances difficiles. « Il est important de maintenir ce lien », nous dit Rita Venkatasawmy. Elle maintient d’ailleurs que les lois internationales et nationales n’empêchent pas l’enfant de rencontrer ses parents. Concernant le cas que nous avons évoqué, Rita Venkatasawmy demande aux parents de venir la rencontrer et que son bureau fera le nécessaire dans ce cas. « On procède au cas par cas. On verra avec la CDU, mais on ne peut blâmer personne sans étudier le cas qui nous concerne », nous rassure-t-elle.

Stéphanie Anquetil : « Ce qui se passe est choquant »

« Il y a un gros problème sur le droit de visite. C’est un droit légitime. Normalement, il devrait y avoir des visites régulières entre les parents et les enfants. Mais cela ne se fait pas à Maurice. Je ne sais pas s’il y a des choses qu’on essaie de cacher et qu’on ne veut pas que les enfants racontent cela à leurs parents », nous explique la députée Stéphanie Anquetil.

Même si des visites sont organisées, cela se passe dans un bureau au siège de la CDU. Selon Stéphanie Anquetil, on a déjà affaire à des enfants vulnérables qui passent par des moments difficiles, qui ont rompu tout contact avec leurs familles et qui se retrouvent avec d’autres enfants qui ont le même problème. « Je l’ai dit à plusieurs reprises au Parlement. Les visites doivent se faire dans un endroit ‘cosy’ et sympathique. Quand cela se passe dans un bureau, les officiers sont toujours omniprésents. Il n’y a aucun moment d’intimité entre les parents et l’enfant », soutient Stéphanie Anquetil, qui compte revenir à la charge sur cela au Parlement prochainement.

Selon notre interlocutrice, il faut aussi noter que les enfants peuvent être retirés de leur famille pour de simples choses, ce qui est navrant. La députée déplore cette manière de faire car selon elle, l’enfant n’est alors pas scolarisé comme il le faut.

En ce qui concerne les ‘shelters’, elle avance que les enfants sont supposés rester provisoirement dans un ‘shelter’ pour qu’après, ils puissent retrouver leur famille. « Au lieu de refaire ce lien familial, ils font exactement le contraire », dit-elle. Stéphanie Anquetil fait par ailleurs ressortir qu’il y a des enfants qui sont toujours bloqués dans des hôpitaux, et que c’est là une situation grave. « C’est un drame que ces enfants vivent », dit-elle. « En sus de ça, il y a beaucoup de problèmes. Au  niveau du personnel, il faudrait voir s’ils sont qualifiés pour faire ce travail. Or, ce sont des nominés politiques qui viennent travailler. C’est triste », fustige-t-elle.

Ally Jookhun : « Pourquoi la CDU sépare l’enfant du parent aussi rapidement ? »

« Quand on parle des parents et de l’enfant, c’est un sujet sensible », dit le travailleur social Ally Jookhun. « Je ne sais pas comment la CDU opère et pourquoi ils séparent l’enfant du parent aussi rapidement, et empêchant par la suite le droit de visite », dit-il. « On ne peut pas séparer un parent et enfant pour des raisons inconnues. »

Il insiste qu’une enquête doit être faite pour connaître la source du problème. Dans la mesure du possible, il ne faut pas séparer l’enfant de ses parents, et il faut respecter le droit d’un parent envers son enfant. Selon lui, avant d’envisager une prise en charge, il faudrait considérer l’encadrement du parent.

En ce qui concerne les visites, le travailleur social indique ce serait meilleur de faire en sorte que l’enfant et ses parents se rencontrent devant un psychologue, un enquêteur ou quelqu’un qui a une compétence appropriée.

 

Hors-Texte

À maintes reprises, nous avons tenté d’entrer en contact la Child Development Unit (CDU) mais en vain. Plusieurs appels de notre part sont ainsi restés sans réponse.