Emprunts « scandaleux » des fonds de pension des employés

CEB

Dans un document déposé cette semaine à la bibliothèque de l’Assemblée nationale concernant les emprunts du gouvernement et des corps paraétatiques, qui fait suite à une question de la députée du PMSD, Malini Sewocksingh, un détail retient l’attention.

Dans la section « Terms and conditions of loans /lines of credit taken by Parastatal Bodies from Domestic sources from January 2015 to June 2018 », on note que le CEB a effectué deux emprunts du CEB Staff Pension Fund et du CEB Manual Workers Pension Fund. Le document, qui émane du ministère des Finances, mentionne deux sommes, soit Rs 508 millions et Rs 514 millions respectivement. Ces emprunts ont pour unique objectif de « regularise the borrowings of CEB from CEB Manual/Staff Pension Fund ». Sauf que contrairement aux autres emprunts, il est spécifié dans le document que les emprunts du CEB aux fonds de pension sont « interest free ».

C’est ce qui nous pousse à aller plus loin dans nos recherches. En consultant les rapports annuels du CEB datant de 2015, 2014 et 2013, on constate que les emprunts des fonds de pension est chose courante.

Mais un autre élément troublant fait surface. Il concerne les modalités des emprunts. Voici un extrait du rapport annuel de 2015 du CEB où les emprunts du CEB Staff Pension Fund et du CEB Manual Workers Pension Fund sont évoqués : « Loans from the CEB Staff Pension Fund and CEB Manual Workers Pension Fund totalled Mur 867.9 M and 447.3 M respectively and are unsecured. Loan agreements have been signed between both parties in September 2015 and the loans will be repaid in 20 equal bi-annual instalments starting as from January 2016. Sums owed to both pension funds, representing additional contribution towards deficits in both Funds have now been formalized and will be repaid in 20 equal bi-annual instalments starting as from January 2016. These amount to MUR 513.7 M and 508 M respectively. These loans are at zero interest rate and refundable over a 10-year tenor ». Cet extrait permet alors de noter qu’aucune sécurité ou garantie n’est offerte quand il s’agit des emprunts et qu’aucun intérêt n’est imposé, contrairement aux emprunts bancaires.

Nous avons sollicité une réaction du député du PTr, Osman Mahomed, qui est responsable du dossier énergétique chez les rouges au Parlement. « C’est scandaleux et grave ! Nous ne pouvons jouer avec l’argent des employés de la sorte. C’est du hard-earned money ! », dit-il.

Par ailleurs, Osman Mahomed s’est interrogé sur plusieurs aspects de ces emprunts et dit qu’il compte soulever la question à la première occasion au Parlement. « Y a-t-il des règlements en place pour régulariser ces fonds ?  Qui gère ces deux fonds de pension ?  Je suis très surpris par le fait qu’il n’y a pas de taux d’intérêt », explique Osman Mahomed. Ce dernier s’interroge davantage : «Pourquoi le CEB doit contracter des emprunts car ils ont réalisé des bénéfices énormes sur le prix bas du mazout ?  Est-ce que les 3 compagnies subsidiaires du CEB engouffrent tellement d’argent qu’il faut combler un manque à gagner ? Dans tout cela, on ne peut mettre à risque l’argent des employés », dit-il.

Jack Bizlall demande à la FSC d’agir

Personne ne connait le dossier des Defined Contribution Schemes mieux que le syndicaliste Jack Bizlall.  Nous l’avons également sollicité pour un commentaire. « Les emprunts se font depuis des années et ils ne sont pas ‘interest free’ », dit Jack Bizlall. Mais lorsqu’on fait part de ce qui est écrit dans le document, Jack Bizlall est d’avis que si tel est le cas, la Financial Services Commission doit intervenir. « Selon la loi, les employeurs n’ont pas le droit de faire des emprunts dans les fonds de pension mais pour le CEB, c’est différent. Tout cela est en raison des déficits dans les fonds de pension. Partout dans Maurice, les fonds de pension sont déficitaires. C’est en raison de l’inflation qui fait monter les salaires », explique Jack Bizlall.

Par ailleurs, le syndicaliste explique que le débat entre lui et le CEB concerne le fait que les employés sont appelés à contribuer 11 % de leur salaire au lieu de 10 %. « C’est enn de bane plis grand crise actuellement, bane fond pension déficitaires », conclut-il. Sollicité, le chairman du CEB, Mootoosamy Naidoo, n’a pas été joignable.

Marwan Dawood