Édito : Larmes …de joie pour certains et de tristesse pour d’autres

Alors que le chef du gouvernement jubile à l’idée de remporter son procès dans l’affaire Medpoint, au point de prévoir, lors du BP de son parti au Sun Trust hier, des festivités pour demain, le pays passe, lui, par des moments extrêmement pénibles. De nombreuses familles se sont trouvées à genoux suite aux inondations de dimanche dernier tandis que 1 300 employés ont eu le choc de leur vie en se retrouvant chômeurs du jour au lendemain. L’on peut difficilement comprendre comment le Premier ministre pourrait songer à célébrer sa victoire, à travers des défilés et des pétarades, tandis que bon nombre de ses compatriotes souffrent. Mais au-delà de l’allégresse de certains et de l’affliction des autres, il incombe surtout de situer la responsabilité de l’État, que ce soit dans le sillage des récentes inondations ou dans la fermeture des usines, dont Palmar Ltée.

Si l’État a failli quant à l’aménagement des drains, provoquant ainsi les accumulations d’eau dans plusieurs régions de l’île, il a aussi fauté en ne venant pas en aide aux sinistrés dans un délai raisonnable. Ce qui trahit dans une certaine mesure l’indifférence du gouvernement face à la détresse de ces familles. Malgré les assurances données par Pravind Jugnauth lundi, dans les faits, rien n’a vraiment changé une semaine après, d’autant que la crainte d’être frappées par de nouvelles inondations assaille ces victimes. Quant à la fermeture des usines Palmar Ltée et Tee Sun, dont les propriétaires sont la famille Lagesse, l’on a du mal à croire que les autorités, dont l’Economic Development Board (EDB), n’aient rien vu venir. À moins qu’elles ne soient complices de cette situation. Surtout que les signes précurseurs étaient là depuis le début de l’année. Qu’ont donc fait les autorités, dont le ministère du Travail, pour y remédier ?

Les grosses pointures du secteur privé ne sont pas tout à fait innocentes en ce qu’il s’agit de la fermeture de ces usines. Elles sont mêmes les premiers coupables de cette triste situation. Il n’y a qu’à voir leur modus operandi pour comprendre leurs intentions réelles. Depuis l’affaiblissement du secteur du textile suivant le démantèlement de l’accord multifibres, les usines ont commencé à shifter leurs opérations à Madagascar, au Bangladesh ou encore en Inde où les coûts de production et la main-d’œuvre sont moins chers. C’est ainsi qu’on a vu la fermeture de plusieurs usines à Maurice, après avoir percé à sec les travailleurs et tiré maximum profit des bénéfices accordés par le gouvernement. Alors que ces usiniers se refont une place au soleil chez nos voisins, l’État mauricien est lui condamné à prendre en charge le lourd fardeau qu’ils laissent derrière eux.

L’attitude de ces industriels est encore plus condamnable quand on sait que la plupart de leurs compagnies sont interconnectées à travers leurs actionnaires ou leurs « holdings ». Comme celles des Lagesse, par exemple. Pourquoi faut-il donc que ce soit l’État qui soit appelé à intervenir pour compenser leurs employés de Palmar Ltée et de Tee Sun respectivement, quand leur groupe fait étalage d’énormes profits. Pourquoi les bénéfices qu’ils perçoivent dans un secteur ne peuvent-ils pas être utilisés pour sauver une de leurs propres compagnies dans un différent secteur ? Où est leur responsabilité sociale ?
Malheureusement, c’est la population qui se retrouve coincée entre les intérêts des uns et des autres. La fête se poursuivra pour certains. Les fortunes grossiront pour d’autres. Au grand dam du petit peuple.