[EDITO] Crash programmé (II)

 

« There are no new ways to crash airplanes », disions-nous dans un de nos éditos intitulé « Crash programmé » en date du 15 octobre 2017 (lire sur https://sundaytimesmauritius.com/crash-programme/). Les événements nous ont finalement donné raison. Comme toute personne ayant un minimum de bon sens et de jugeote, on le voyait déjà venir ce crash programmé. D’abord parce que, sous le présent gouvernement, l’interventionnisme politique au sein de la compagnie d’aviation nationale a pris le dessus, jusqu’au point de dépasser le cadre de l’entendement. Surtout quand on sait que ce n’est pas par coïncidence que des amendements avaient été apportés à l’‘Immigration Act’ pour déclarer le pilote belge Patrick Hoffman comme un « prohibited immigrant ». Cet ancien commandant de bord d’Air Mauritius avait été victimisé par les gouvernants du jour parce qu’il avait tiré la sonnette d’alarme sur certains problèmes auxquels faisait face la compagnie et surtout parce qu’il avait osé traiter Pravind Jugnauth de « fou ». Cela démontre à quel point l’ingérence du gouvernement a gangrené la compagnie.

Bien entendu, certains diront que l’interventionnisme politique ne date pas d’hier. En effet. Mais il y avait quand même une limite à ne pas franchir. Toutefois, Pravind Jugnauth n’en a eu cure. Quand des gestionnaires de calibre avaient été évincés au profit des sous-fifres de Lakwizinn, cela ne pouvait que sonner le glas. Qu’on ne vienne pas maintenant tout imputer au Covid-19. La situation financière d’Air Mauritius a été rendue encore plus difficile avec la fermeture de nos frontières, certes. Mais le Covid-19 n’est en aucun cas le seul responsable de la mise sous administration volontaire de la compagnie d’aviation nationale. Sinon, le « Transformation Steering Committee » mis en place en janvier de cette année n’aurait pas eu sa raison d’être.

Ce comité, composé des proches de Lakwizinn, en l’occurrence le « blue-eyed boy » Sherry Singh, Shakilla Jhungeer, candidate battue du MSM aux dernières élections, et Ammanah Saya Ragavoodoo, l’avouée de Pravind Jugnauth qui a été placée aux autorités électorales (l’ESC et l’EBC), était censé restructurer Air Mauritius pour qu’elle puisse renouer avec la profitabilité. Sauf que ces nominés n’ont aucune expérience dans le domaine de l’aviation ! Ce qui laissait déjà présager ce qui allait se passer. Bien sûr, le Covid-19 peut maintenant servir de parfait bouc-émissaire pour justifier le « nosedive » de MK. Espérons qu’à la reprise parlementaire, l’opposition réclamera des explications concernant les rémunérations et autres bénéfices perçus par Sherry Singh et consorts et que le Premier ministre jouera le jeu de la transparence en les divulguant. Pour être honnête, cela nous semble quand même farfelu. Si un Premier ministre peut passer sous silence la mise sous administration d’un fleuron national, gageons qu’il se réfugiera derrière la « Companies Act » pour ne pas y répondre, si question y relative il y en a. Tout comme il l’avait fait dans le cas de Mauritius Telecom.

Parions que le chef du gouvernement utilisera la même ruse pour ne pas divulguer les rémunérations faramineuses que percevra sans doute l’administrateur Satar Hajee Abdoula. Car la notion d’« accountability » n’a jamais été le fort de ce gouvernement. Ce qui justifie d’ailleurs le choix de Satar Hajee Abdoula comme administrateur de MK. Cet homme de confiance de Pravind Jugnauth semble exceller dans l’art de faire les basses besognes. Et de les garder sous tapis. «Everybody was against Pravind. I was the only one who stood by him. When Navin wanted to grab the hotel of Sands, I was the only one who stood by him. That’s the relationship ». Cet aveu avait été fait par nul autre que Satar Hajee Abdoula lui-même. Ce qui en dit long. On n’ose plus espérer que cet « asset stripper » ne liquidera pas Air Mauritius. Et qu’il ne négociera pas non plus derrière le dos de la population, sachant comment il avait fait chanter Dawood Rawat à Paris dans l’affaire BAI.