Drogue : Entre paroles et actions

Rs 1, 4 milliard de drogues ont été saisies dans l’entrepôt de Scomat à Pailles durant la semaine. De quoi nous donner le tournis. Imaginez un seul instant les ravages que cette drogue aurait pu faire si elle avait été écoulée sur le marché. Rien qu’en y pensant, nous avons des frissons. Étrangement, personne au sein du gouvernement, encore moins le Premier ministre, ne s’est évertué jusqu’ici à se bomber le torse pour s’auto-congratuler suite à cette saisie record de drogues. Ce qui n’est guère surprenant. Pourquoi ? Tout simplement parce cette saisie n’est pas le fruit d’un travail assidu mené par les autorités, car ce sont des travailleurs de Scomat qui ont découvert le pot aux roses. Cette saisie record de cocaïne ne reflète, en réalité, que l’incompétence, l’amateurisme ou pire, la complaisance ou la complicité qui existe au sein de certaine de nos institutions, dont la douane.

Posez-vous la question : comment diable une tractopelle contenant 95 kilos de cocaïne a-t-elle pu échapper aux contrôles douaniers ? Si celle-ci a pu franchir la douane sans grand problème, l’on est en droit de se demander combien d’autres cargaisons de produits stupéfiants ont filé à travers les mailles de la douane par manque de vigilance ou par complicité et malhonnêteté d’une poignée de fonctionnaires véreux.  Car des ripoux, il y en a bel et bien au sein des autorités douanières. Il reste maintenant à savoir si ces complices ont profité de l’arrivée de Mauricio sur le même navire pour dévier l’attention de cette tractopelle ou si les douaniers ont carrément failli à leurs responsabilités en ne procédant pas à des contrôles minutieux, d’autant qu’il était question à un certain moment dans l’affaire Kistnah que des tractopelles soient utilisées pour faire filtrer des stupéfiants à Maurice.

Il est aussi tout à fait incompréhensible comment 72 heures après cette saisie record, aucune arrestation n’a encore été effectuée. Même les interrogatoires se font, semble-t-il, au petit bonheur. L’on se demande ainsi si les directeurs de Scomat n’auraient-ils pas dû au moins être entendus ne serait-ce que pour avoir des indices qui pourraient faire aboutir l’enquête. À moins que ce ne soit la présence d’un nominé politique du gouvernement parmi les directeurs qui a refroidi l’ardeur des enquêteurs. Avec une saisie d’une telle envergure, ces derniers auraient dû agir rapidement. Ce qui ne nous semble pas être le cas.  Ce n’est pas ainsi qu’on arrivera à bout du trafic de drogue.

Le Premier ministre doit le savoir. S’il veut vraiment s’attaquer au trafic des stupéfiants, il doit d’abord revoir et réorganiser le fonctionnement de la police et de la douane. Car ces organismes demeurent les maillons forts dans cette lutte. Mais le temps lui fait défaut. D’autant que cette saisie vient gâcher tout le track record que le Pravind Jugnauth se targuait d’avoir réalisé dans son combat contre le trafic de drogue. Tout comme le rapport Lam Shang Leen avait jeté le discrédit sur son gouvernement en pointant du doigt des membres de son propre camp. S’agit-il d’une simple coïncidence … ?