Déracinée au profit du Metro Express

Sayroon Ramatally, 90 ans

Pendant que le gouvernement s’active pour que les premiers coups de pioche soient donnés ce mois de septembre dans le cadre du projet Metro Express, sur le tracé proposé de véritables drames humains se jouent. Des habitants de certaines régions ont reçu une ordonnance d’éviction les sommant de quitter leur maison en 24 heures. Sayroon Bibi Ramatally en fait partie.

Elle doit quitter la maison où elle habite depuis 1947 alors qu’elle n’avait que 20 ans. Le mardi 29 août, Sayroon reçoit une lettre. Comme elle ne sait pas lire. Il revient à son fils Asraff de prendre connaissance du contenu. Ce dernier tombe des nues quand il apprend que sa mère doit évacuer cette maison, où lui et ses deux sœurs ont vu le jour, 24 heures après réception de la lettre.

« C’est vraiment choquant. Depuis que ma mère a reçu cette lettre, on n’arrive pas à dormir. Depuis qu’elle s’est mariée avec mon père, il y a 70 ans de cela, elle a toujours habité dans cette maison. Mes deux sœurs et moi sont nés ici. Maintenant le gouvernement demande à notre mère de 90 ans de vider les lieux. C’est injuste », affirme Asraff Ramatally.

Selon ce dernier, la lettre dit que sa mère est en train de squatter un terrain de l’État.

« Ma mère n’est pas une squatteuse. Cette maison faisait partie des Railway Services sous l’ère britannique. Ce sont les Anglais qui ont donné cette maison à mes parents et pas le gouvernement actuel ou le précédent. »

Hors d’elle, la fille de Sayroon n’arrive pas à se calmer. Elle fustige le Premier ministre et le gouvernement dans son ensemble.

« Premyer miniss la c’est nou ki finn donn li seze pou assizer et nou capave rass seze la ar li. Sa la caz la pa sa gouvernma ou soi enn lott gouvernma morisyen ki finn donn mo papa et mo mama. C’est gouvernma britanik. Kan enn kamion container pa pe kapav rente dans enn sime, ou pas craze la caze deux coter pou fer kamion la passer », a déclaré la sœur d’Asraff.

Lors de notre rencontre avec Sayroon Ramatally et ses enfants le mercredi 30 août, des officiers du ministère des Terres et du Logement ainsi que ceux du ministère des Infrastructures publiques accompagnés de policiers ont débarqué au domicile de Sayroon Bibi Ramatally.

Ces derniers sont étonnés de voir le député Guy Lepoigneur leur ouvrir la porte. Selon le député, c’est « vraiment injuste » ce que le gouvernement est en train de faire.

« On ne peut pas demander à une dame de 90 ans de quitter, en 24 heures, la maison où elle habite depuis 70 ans. Qui plus est, le gouvernement la traite comme une squatteuse. Le gouvernement ne lui a même pas fait de proposition ou lui donner une compensation », déplore le député Lepoigneur.

Une vraie arnaque !

Tout comme les Ramatally, une quinzaine de familles à Cité Barkly vont devoir quitter leur maison en raison du projet Metro Express. Sunday Times a appris que ces derniers ont eu une rencontre avec le ministre Anil Gayan, le PPS Alain Aliphon et le PS Swaminathen Ragen au ministère des Terres et du Logement. De source bien informée, Sunday Times a appris qu’aucune proposition n’a été faite à ces quinze familles. Asraff Ramatally était présent à cette rencontre. Il nous explique que le PPS Alain Aliphon et le PS Swaminathen Ragen lui ont fait comprendre que seule l’ancienne partie de la maison où se trouve la cuisine, la salle de bain et les toilettes seront détruites et non pas la partie récemment construite.

Autant dire que c’est carrément une invitation à Sayroon Ramatally de vider les lieux. Car on voit mal comment une vieille dame de 90 ans fera ses besognes ou prendra son bain dans la rue. Pour revenir à Asraff Ramatally, il ajoute : « Nou finn gagn enn renconte avek PPS et PS Swaminathen Ragen kan miniss Anil Gayan finn vini. Li finn dire donn nou papier A4 pou ki nou dir ki nou bann doléances. C’est seki nou finn fer. Nou finn demander ki nou gagn enn lacaz NHDC ki en konstruksyon à Chebel. PPS Aliphon et PS Ragen finn dire moi mett tousala lor papier. Mais zott pa finn donn nou okenn garanti. »

Asraff Ramatally reconnait être tombé dans un « piège ». Car il n’y a eu aucune garantie du gouvernement que sa mère et lui seront relogés ailleurs. Sunday Times s’est procuré une copie de la lettre de doléance d’Asraff Ramatally. Premier constat, ce dernier n’a pas été informé à qui la lettre devrait être adressée. Deuxième constat, elle ressemble beaucoup à une lettre qui a été dictée.

« Je suis d’accord pour le projet de Metro Express moi avec ma maman Sayeroon de partir aller vivre dans une autre maison pour laisser la place libre avec condition d’avoir une maison NHDC à Chebel dans un délai de 5 mois. »