Congé de paternité prolongé de 25 jours : Les entreprises pourront-elles y faire face ?

Dans son discours-programme le vendredi 24 janvier dernier, le Président de la République, Prithviraj Roopun avait annoncé quelques mesures du gouvernement de l’Alliance Morisien qui, semble-t-il, sont des tremplins pour encourager les couples à concevoir plus d’enfants. Parmi, la prolongation des congés de maternité et de paternité.

Si le congé de maternité a été favorablement accueilli, car les mamans méritent bien du repos avant de pouvoir entamer une nouvelle étape, celle de mère et d’employée, le congé de paternité, lui, fait débat.

Alors que les papas bénéficiaient jusqu’ici de cinq jours consécutifs de congé à partir de la date de la naissance de leurs progénitures, ils auront désormais un mois de congé avec l’amendement de la loi du  travail, soit 25 jours additionnels ! Bien que des pères soient l’épine dorsale de la famille et qu’ils doivent être aux côtés de leurs femmes et enfants, l’enjeu demeure cependant sur les effets négatifs que ce temps de congé pourrait engendrer. Cependant, les syndicalistes sont eux sur la même longueur d’onde avec le gouvernement car ils avaient demandé toutes trois semaines de congé de paternité.

Le problème de vieillissement de la population est la cause de toutes ces initiatives de la part du gouvernement pour encourager les couples à avoir plus d’enfant. Alors qu’il fallait mettre en place des mesures concrètes pour cet encouragement, la prolongation du congé de maternité et de paternité n’est pas sur cette lignée.  « Un couple ne pensera pas forcement à concevoir un enfant seulement pour bénéficier du congé. Cette mesure passe totalement à côté du désir du gouvernement de voir naître plus d’enfants sur le sol mauricien, » constate l’économiste Eric Ng.

Pour lui, ce ne sont que des mesures qui porteront secours financièrement aux couples qui pourront booster les naissances. À titre d’exemple, des subsides sur les produits pour bébé pourraient définitivement faire bouger les choses. D’autant plus que le lait des nourrissons et les couches comportent déjà une grosse somme pour les parents, sans compter le fait de pouvoir payer un nounou pour s’occuper de l’enfant si les deux parents travaillent.

Un coût additionnel pour les entreprises

Eric Ng tire la sonnette d’alarme : cette mesure aura définitivement une séquelle négative sur les entreprises qui devront trouver un remplaçant pour un employé pendant son congé d’un mois. « Le hic devient que c’est difficile à employer une personne pour seulement un mois et la mettre à la porte une fois ses services terminés. De plus, avec le congé prolongé de paternité, la production est ralentie et des retards sont accumulés dans les travaux. Plusieurs compagnies se retrouveront dans une situation où ils ne pourront accorder un mois de congé car cela est énorme dans la balance de l’entreprise. Il pourrait même avoir l’urgence de faire les autres employés faire des heures supplémentaires pour combler le manque. » Cela aussi engendra un coût additionnel pour payer les heures supplémentaires, selon lui.

D’autre part, hormis les compagnies, cela pose problème également aux bénéficiaires du congé de paternité. « S’ils acceptent à prendre un mois de congé, le risque qu’ils ne soient pas considérés pour une promotion s’enfle. Cela applique de même pour les femmes qui verront elles-aussi un supplément dans leurs congés de maternité. Bien que ce soit bon pour les parents d’avoir leurs congés bien mérités pour s’occuper de leur bout de chou, les risques sont toutefois là, » constate Eric Ng.

En ce qui concerne s’il y aura des licenciements dû aux congés prolongés, l’économiste est peu sceptique. « C’est assez difficile à dire. Cela devient encore un concept additionnel qui fera des débats. »

Il a aussi commenté l’allocation que perçoivent les parents, au nom de l’enfant à la naissance de celui-ci. Eric Ng ne vois pas l’utilité de donner Rs 200 à chaque nouveau-né. Ce chiffre est resté inchangé depuis des décennies alors que le coût de la vie ne cesse d’augmenter. Même Rs 300 ou Rs 400 n’auraient pas été suffisantes. « Le coût relié à un enfant est beaucoup plus élevé de nos jours par rapport à il y  a trente ou quarante ans. On doit compter le futur de l’enfant, y compris ses coûts d’études entre autres. Aussi, c’est un fait irréfutable qu’aujourd’hui un enfant ne peut s’en passer d’avoir un Smartphone à l’âge de 7 ou 8 ans, voire même plus jeunes dans certains cas. Donc, pour la classe moyenne, Rs 200 ne représentent que des miettes face à ce que coûte un enfant. »

Pourquoi pas un ‘baby bond’ ?

Dans le dernier budget du gouvernement, on avait introduit un ‘silver bond’ pour les personnes âgées. Ce silver bond permet aux ainés de plus de 65 ans d’économiser à un taux très bas en achetant des bonds qui sont disponibles dans toutes les banques commerciales. Pourquoi pas donc un baby bond pour encourager les naissances si c’est vraiment une priorité pour le gouvernement ? Les futurs parents pourront ainsi économiser pour l’avenir de leurs enfants.

En chiffres

Au 1er juillet 2019, Maurice comptait une population de 1 222 340 personnes alors que Rodrigues comptait 43 371 habitants. Agalega et St Brandon, ensemble, comptaient 274 personnes. Ce qui fait un total de 1,265,985 personnes pour l’ensemble de la république de Maurice à cette date, soit une légère hausse de seulement 0.01% contre la même période en 2018.

De janvier à juin 2019,  6 670 bébés ont pris naissance dans la République de Maurice, dont 93 d’entre eux sont morts durant  la même période.