Située dans la région de Pailles, Cité Jonction est l’un des quartiers les plus sous-développés en termes d’infrastructures de l’agglomération de Port-Louis. Autrefois sous l’autorité du Conseil de district de Rivière Noire, elle est passée depuis trois ans déjà sous l’administration de la municipalité de Port-Louis. Aux dires des habitants, c’est là qu’a débuté leur calvaire, avec en premier lieu une décision de la mairie de ne plus rouvrir le centre polyvalent de la localité, privant ainsi les jeunes d’un espace de loisirs. De plus, une bonne partie des habitants est plongée dans une extrême pauvreté. Il existe toutefois quelques rares habitants qui ont pu sortir la tête hors de l’eau. Malgré qu’ils aient le sentiment d’être « oubliés », les habitants décident de prendre leur destin en main, à travers l’association Young Spirit. Reportage…

Ashley Jacques

Cité Jonction : l’enfant pauvre de la région de Pailles

La Cité Jonction existe depuis plus de 35 ans déjà et comprend un peu plus de 75 maisons. Avec ses quelques 500 habitants, perdue aux confins de Pailles, elle souffre d’un manque cruel de développement infrastructurel et sportif, couplé d’un chômage irréversible… tant de problèmes qui marquent ce lieu. Considérée comme une poche de pauvreté par les travailleurs sociaux, cette cité, comme de nombreuses localités, reflète l’image d’un mal-vivre intenable.

Le centre polyvalent de Cité Jonction fermé depuis trois ans !

Le centre polyvalent de Cité Jonction, qui servait autrefois comme centre récréatif et éducatif, n’est plus opérationnel depuis environ trois ans déjà. Selon nos recoupements, ce sont les autorités municipales de Port-Louis qui sont derrière cette fermeture. Comme les jeunes et les enfants n’ont aucun endroit pour pratiquer un loisir quelconque, la rue reste leur unique lieu de rencontre.

Amphithéâtre : « En cas de mauvais temps, on ne peut pas pratiquer nos activités ! » 

Grace à l’aide financière de plusieurs compagnies privées de la région de Pailles sous le projet Pran Kont, un amphithéâtre a été aménagé, un édifice de plan elliptique et à gradins, destiné aux spectacles.

Comme cette localité ne comprend aucun centre de loisir, l’amphithéâtre reste l’unique lieu où les travailleurs sociaux de la région, avec l’aide de ENL Foundation, organisent des activités ludiques et des séances de rattrapage scolaire tous les après-midis. Ils sont en moyenne 60 à 80 enfants qui participent régulièrement à ces activités récréatives. Juliana, étudiante en Grade 7, déclare qu’elle aime bien les activités que proposent les travailleurs sociaux. Cependant, elle se dit attristée que l’amphithéâtre n’a aucune toiture et que la région ne comprend aucun autre centre couvert, car durant les intempéries, les participants sont contraints de rentrer chez eux.

2aDiane Mourade, fervente travailleuse sociale de la région et l’initiatrice du projet d’Accompagnement Scolaire à Cité Jonction, affirme que c’est un plaisir pour elle de travailler avec les enfants et les jeunes de son quartier. « À travers nos différents projets, nous mettons beaucoup d’emphase sur l’importance de l’éducation car c’est le seul moyen pour faire reculer la pauvreté et les autres problèmes sociaux », affirme cette mère de deux enfants. Elle se réjouit que la Cité Jonction peut compter sur la fondation ENL, qui depuis plus de dix ans déjà, a implémenté divers projets pour valoriser les talents des habitants et de faire reculer la pauvreté.

Cependant, la travailleuse sociale n’épargne aucune critique contre la mairie de Port-Louis. Diane Mourade, qui est enseignante dans une école spécialisée, affirme avoir sollicité l’aide municipale à maintes reprises par rapport  aux doléances des habitants, surtout concernant la réouverture du centre polyvalent mais ses multiples tentatives se sont révélées infructueuses. « Ancien le maire Port-Louis ti promet nou ki li pou vine fer 1 site visite ek pou resoudre nou problemes mais nou encor pe attane », fulmine-t-elle.

Young Spirit Association : les habitants prennent leur destin en main

À travers la Young Spirit Association (YSA), les travailleurs sociaux de la région ont décidé de coordonner leurs efforts, déjà bien engagés, pour mieux encadrer les jeunes. « La YSA soutient les jeunes personnes vulnérables à travers l’éducation et les actions communautaires dans la région de Pailles et des alentours », précise Jason Colimalay, le président de cet organisme. L’objectif de ce groupe est d’aider les enfants et les adolescents à donner le meilleur de leur potentiel, et de consolider les cercles familiaux et communautaires.

La YSA œuvre pour le bien-être, le développement spirituel et l’épanouissement des enfants de plusieurs régions. Le 27th Port-Louis North West Scout Group est aussi affilié à cette ONG. Les membres de ce regroupement de scouts se donnent rendez-vous chaque samedi dans l’enceinte de l’école du gouvernement de Grande-Rivière, pour organiser des activités de jeunesse.

 

4bD’emblée, Jason Colimalay déplore le fait que son groupe doit payer pour utiliser la cour de cette école. « Nous bizin paye Rs 2 800 tous les mois pou capav servi sa la cour lekol la. Sak 3 mois, nou bizin paye ene somme additionnel de Rs 2 500 avek ministere l’education toujours pou bann frais utilisation sa lekol la. Par an, li coute nou a peu pré Rs 50 000 », s’insurge-t-il. Ce dernier lance un appel au bon sens de la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookhun-Luchoomun, de faire preuve de flexibilité. Il avance que son association pourrait utiliser cet argent pour financer les activités de son groupe.

La Foret Lespwar, une production des jeunes de Cité Jonction

Les jeunes de Cité Jonction regorgent de talents. Plus de 65 enfants, de 6 à 16 ans, de cette localité et des régions avoisinantes, planchent depuis plus de six mois sur un spectacle inspiré du Livre de la Jungle. Le spectacle s’intitule La Foret Lespwar, Spektak Mowgli Dan Lazeng. La date de la présentation est pour le 14 avril prochain.

Pour l’heure, le seul souci des organisateurs est le financement. Le coût pour la production de ce spectacle est estimé à Rs 1. 5 M. Tous ceux et celles qui souhaitent apporter une contribution sont priés de contacter l’équipe de YSA sur le 59 85 81 18.

Patrice Armance : « La balle est dans le camp de la mairie de Port-Louis » 

Patrice Armance, député de la circonscription no.1 (Grande Rivière Nord-Ouest / Port Louis Ouest) déclare avoir entamer des pourparlers avec les autorités municipales depuis plusieurs mois déjà. « A l’époque ou Oomar Khooligan était le maire, nous avons entamés plusieurs discussions pour la réouverture du centre municipale de Pailles. On nous a fait comprendre que la mairie comptait entreprendre des travaux de rénovation au sein de ce centre mais jusqu’ici rien n’a été fait », se désole-t-il. Le député et également membre du PMSD confie toutefois que la conseillère municipale Daniella Hector compte soulever cette affaire au prochain conseil municipale.