Changement climatique : Maurice est-il prêt à faire face?

Le changement climatique est un phénomène global qui désigne l’ensemble des variations des caractéristiques climatiques en un endroit donné, au cours du temps : réchauffement ou refroidissement. C’est une forme de bouleversement climatique qui entraîne des dommages importants : pertes de vies, disparition de certaines flores et faunes, élévation du niveau des mers, la réductiondes biodiversités, une augmentation de la fréquence et de l’intensité des catastrophes naturelles d’origine climatique (sécheresses, inondations, tempêtes, cyclones),des épidémies plus résistantes, entre autres. L’activité humaine est considérée comme la cause principale du changement climatique. À travers la déforestation massive,  l’émission des gaz à effet de serre et d’autres activités nocives, l’être humain continue à mettre en danger la survie de notre planète. À Maurice, on parle de flash flood, d’inondation, de pluies torrentielles, de canicule ou encore d’orage violent. Le changement climatique cause des dégâts énormes. Alors que les environnementalistes tirent la sonnette d’alarme. Les plus radicaux proposent qu’on passe à 100% d’énergie verte. De leur côté, les autorités concernées multiplient les recherches afin de comprendre l’impact du changement climatique sur l’environnement.  Mais tout cela est-il suffisant pour se protéger ? Sommes-nous prêts à faire face au changement climatique ?

Selon les statistiques du World Risk Report de 2015, Maurice est classé 14eparmi les pays les plus à risque aux catastrophes naturelleset 7e sur ceuxfortement exposés aux aléas naturels. Un constat alarmant qui  devrait alerter tous ceux vivant dans ce pays.La survie humaine est menacée et personne n’est à l’abri. A-t-on déjà oublié les inondations meurtrières du 30 mars 2013, qui ont coûté la vie à onze personnes ou encore celles du 10 février dernier, qui ont laissé certaines régions du Nord, sous les eaux causant des dégâts matériels ? Dans son discours lors du Paris Climate Agreement en avril dernier, le secrétairegénéral des Nations Unies a déclaré ceci : “The world is in a race against time. The era of consumption without consequences is over. Today you are signing a new covenant with the future. This covenant must amount to more than promises”. Cet accord,  que Maurice a signé le 22 avril dernier, vise à recueillir la participation des pays, souhaitant réduire les émissions des gaz à effet de serre le plus bas que possible afin de permettre l’absorption des pollutions par des arbres. Maurice a aussi participé à la 3e Conférence mondiale sur les préventions des catastrophes. L’évènement a  eu lieu au Sendai au Japon en mars l’année dernière, dans le but de réduire les risques et de prévenir des nouvelles calamités à travers la mise en place des mesures économique, structurel, juridique, sociale, santé, culturelles, éducatives, environnementale, technologique, politiques et institutionnelle.

Un workshop sera ainsi organiséà Maurice à l’initiative du « United Nations Office for Disaster Risk Reduction » (UNISDR) pour faire un suivi du cadre Sendai. Au cours de cet atelier de trois jours, les participants devraient avoir un aperçu complet et plus clair sur l’implémentation des nouveaux plans au niveau national. L’UNISDR va fournir des outils mondialement reconnus que les participants utiliseront pour identifier les lacunes et établir des plans d’action avec l’aide des personnes ressourcées.

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Khalil Elahee : « Cela ne fait que commencer »

Malgré les efforts déployés par les autorités à travers les conférences organisées, pour Khalil Elahee, lecturer en énergie à l’Université de Maurice, on est loin d’être sauvé.Selon lui, on a pris trop de retard à prendre des mesures contre le changement climatique. Se basant sur ses propres recherches, il affirme que le changement climatique ramène des phénomènes inhabituels dans le monde entier. Une étude menée par les scientifiques démontre que les catastrophes auxquelles nous faisons face ne sont pas des catastrophes ‘naturelles’, car l’être humain est le seul responsable de ces dégâts, de par ses abus sur la planète terre. Sur un ton critique, il demande qu’on s’habitue aux changements de ce siècle car, selon lui, cela ne fait que commencer.

Par ailleurs, il affirme que la station météo de Vacoas  n’est pas à blâmé car avec le changement climatique, il est devenu difficile de prédire le temps. « Je sympathise avec la météo de Maurice car je sais que c’est difficile de prédire. Le changement climatique est imprévisible. Les flash floods, les vagues de chaleur et les turbulences atmosphériques sont de plus en plus fréquentes. Le plus étonnant demeure le fait qu’à Maurice, les cyclones ne font plus de victimes car c’est un phénomène rare et que maintenant on fait face aux inondations meurtrières. Néanmoins je pense que la météo doit prendre cela comme un défi et essayer de produire des recherches plus concrètes », lance-t-il.

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« Chaque individu et chaque pays ont leur rôle à jouer…»

«Il est conseillé d’agir immédiatement. Il faut conscientiser la population et  par la suite prendre des mesures contre l’évolution de ces phénomènes. Nous pourrons bénéficier de 100% d’énergie renouvelable d’ici 2050, la date-butoir, si on agit dès maintenant », déclare Khalil Elahee. Il suggère l’élimination des énergies non renouvelables telles que l’énergie fossile. Les autorités doivent, selon lui, revoir les techniques de construction, car le béton attire la chaleur. Les moyens de transport sont trop polluants. Pour assurer une vie meilleure, il propose qu’on tourne vers un bioclimatique pouréviter ainsi des événements extrêmes.Maurice et les autres pays à travers le monde doivent se mobiliser pour trouver des solutions à long terme. Les experts, les représentants et les observateurs doivent mettre en avant des mesures pour limiter le réchauffement climatique pour l’avancement du pays. La planète s’achemine vers un réchauffement de 2.7ºC  d’ici la fin du siècle au vu des promesses de réduction de gaz, limite fixée par l’ONU.  Khalil Elahee est catégorique : « Chaque individu et chaque pays ont leur rôle particulier à jouer dans la lutte contre le changement climatique, l’une des plus grandes menaces que doit affronter l’humanité. »

Conscientiser la population

Seuls nos lagons permettent à 2 200 pêcheurs artisanaux de survivre. Cette ressource naturelle qui contribue grandement à l’économie de notre pays se trouve en danger. À la plage de Flic- en-Flac, Cap Malheureux, La Preneuse, Le Morne et Trou-aux-Biches, l’érosion des plages continue. En 2014, l’État a dû dépenser Rs 85,5 millions pour rétablir ces plages. Soulignons que chaque année, le secteur du tourisme et celui de la pêche, rapportent à eux seuls, plus de Rs 24 milliards au pays. La détérioration de notre environnement influence fortement la production nationale. Les pêcheurs professionnels sont en danger de perdre leur gagne-pain, car les animaux marins sont affectés par le changement de température des eaux.La montée des eaux, le blanchiment des coraux, une hausse de température, l’érosion des plages, la situation se détériore.Les activités humaines en mer détruisent nos ressources marines.

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Zara Currimjee et Vanina Harel, deux étudiantes mauriciennes aux États-Unis veulent apporter un changement. Elles rêvent de voir l’océan se regorger de poissons et de coraux en pleine santé. Elles croient que chaque individu a sa propre contribution à apporter dans cette lutte. Ainsi, elles ont tentéde conscientiser la population sur la détérioration de nos lagons, à travers un film-documentaire, intitulé Vey Nou Lagon. Ce film raconte la vie d’un pêcheur qui doit subir les conséquences du changement climatique. Les images illustrent la dégradation des espèces marines à travers ses yeux. Ces deux amoureuses de l’océan ont parcouru l’île entière ainsi que Rodrigues et ont recueilli les témoignages des pêcheurs. Les deux jeunes environnementalistes ont fait visionner le film par le grand public dans plusieurs régions, à savoir Poste de Flacq, Grand Baie, Preneuse, Bel Ombre et ce pendant quatre jours.

Du côté de la station météo de Vacoas, on s’attend toujours à ce que la Radar météo Doppler S-Band, financé à hauteur de Rs 387 millions par le gouvernement japonais, soit opérationnel. Cet équipement devrait permettre à la station de déterminer avec précision la formation de zones nuageuses pluvieuses dans un rayon de 250 kilomètres autour de Maurice et prévenir ainsi les risques de pluies diluviennes. Cependant, il nous faudra attendre encore quelques années pour doter la station de cet outil technologique, car il s’avère que cela ne se fera pas avant 2018. Contacté au téléphone pour savoir plus sur cet équipement de pointe, un préposé de la station de Vacoas, nous a laissé sur notre faim.