Mario Nobin, l’outil politique du gouvernement

 

« Je partirai en septembre ». C’est ce que Mario Nobin avait dit il y a quelques mois de cela. Or, le contrat du Commissaire de police a été prolongé par le Premier ministre, vendredi, pour une période de six mois. Officiellement nommé Commissaire de police (CP) par la “Disciplined Forces Service Commission” (DFSC) le 21 avril 2015, Mario Nobin a cumulé les gaffes jusqu’à faisant même l’objet de deux enquêtes … de la police, qu’il dit avoir ordonné lui-même et de l’ICAC ! Mais, évidemment, ces deux enquêtes piétinent, contrairement à ce petit voleur de litchis pris la main dans le sac chez le CP et qui a été condamné à six mois de prison le même jour.

En dépit de toutes les critiques à son encontre, Nobin reste cependant bien en selle, encore plus fort après le renouvellement de son contrat tandis que le ‘law and order’ ne cesse de dégénérer. D’ailleurs, il bénéficie toujours de la bénédiction de l’hôtel du gouvernement, de Pravind Jugnauth, mais aussi du Mentor SAJ, celui-ci ayant même déclaré lors d’une PNQ en juin 2018 qu’il n’y avait « aucune raison de limoger Mario Nobin ». Aux Casernes centrales aussi bien que dans les rangs de l’opposition, le renouvellement de son contrat à l’approche des élections serait un indice certain que la police serait utilisé à des fins politiques durant les prochains mois jusqu’aux élections…

 

Affaire Sun Tan

Émission d’un mandat d’arrêt malgré une interdiction de la cour

C’est un bras de fer qui a secoué le judiciaire et qui a tenu tout le pays en haleine en 2015. Suite à des allégations faites dans un affidavit par deux anciens ministres du gouvernement, nommément Showkutally Soodhun et Roshi Badhain, contre le DPP Satyajit Boolell pour « false and malicious denunciation in writing » dans le sillage de l’affaire Sun Tan, la police de Mario Nobin avait émis un mandat d’arrêt contre le DPP. Le hic, c’est que ce mandat d’arrêt n’aurait pas dû être émis en premier lieu puisqu’il faisait fi d’un ordre intérimaire de la cour, le DPP ayant obtenu une injonction de la Cour suprême pour qu’il ne soit ni interrogé ni arrêté par la police ou l’ICAC dans le cadre de cette affaire.

Le ‘landing’ de la police chez le DPP aux petites heures du matin du 16 juillet 2015 et ses tentatives désespérées de l’arrêter en dépit de cet ordre intérimaire de la cour avaient ainsi été vivement dénoncés par les partis de l’opposition. Un épisode qui donne la perception que Mario Nobin se laisse dicter par des dirigeants politiques, quitte à … faire fi de la loi qu’il est censé faire respecter !

Affaire Mike Brasse

Un CP qui facilite l’octroi du passeport d’un trafiquant

Il est le Commissaire de police mais qu’à cela ne tienne, Mario Nobin ne s’est pas pour autant gêné pour faciliter les procédures afin que le trafiquant de drogue Mike Brasse puisse obtenir illico presto un passeport pour se rendre à l’île sœur où le skipper a finalement été arrêté avec Rs 600 millions d’héroïne. Mario Nobin n’a  même pas nié être intervenu pour qu’un ‘Restrictive Passport’ soit remis au skipper le 17 septembre 2016. Sa seule défense : il ne savait pas que Brasse était un trafiquant alors que celui-ci était sous surveillance par l’ICAC.

L’ASP Boodhram, ainsi que d’autres hauts cadres de la police, ont d’ailleurs clairement fait ressortir lors de leur interrogatoire par l’ICAC qu’ils ont agi sous les instructions du CP. Mis en cause, Mario Nobin a ordonné à un de ses hommes, Devanand Reekoye, d’ouvrir une enquête sur cette affaire dont il fait lui-même l’objet d’accusations. La commission anti-corruption y enquête également. À ce jour, ces deux instances poursuivent toujours leurs enquêtes alors que le CP, libre comme l’air et pas le moindrement inquiété jusqu’ici, poursuit son petit bonhomme de chemin comme si de rien n’était.

 

Affaire Hurreechurn

Une intervention personnelle qui interpelle

Pourquoi le CP est-il intervenu dans l’enquête de la « National Preventive Mechanism Division » de la « National Human Rights Commission » (NHRC) dans l’affaire Hurreechurn le 2 novembre 2016 ? La question est demeurée jusqu’ici sans réponse. Le constable Arvin Hurreechurn, présumé passeur, avait été retrouvé mort dans sa cellule, suivant un prétendu suicide. Or, Me. Hervé Lassemillante, vice-président de la NPMD, avait conclu, que ce suicide devait être considéré comme un cas suspect. L’intervention personnelle de Mario Nobin auprès de Marie Lourdes Lee Yin Lam Hung, présidente par intérim de la NHRC, avait été dénoncée puisqu’elle sentait le roussi, d’autant que les proches du constable avaient parlé de faussetés entourant son interpellation.

 

Marche pacifique de la POSU

Marche arrière de Nobin

Mario Nobin avait catégoriquement refusé d’accorder la permission à la « Police Officers Solidarity Union » (POSU) de tenir une marche pacifique qui était prévue pour le 29 novembre 2018. Celle-ci visait à dénoncer les conditions de travail, les promotions, les transferts punitifs et la non-application des recommandations du Pay Research Bureau. Vous l’aurez compris : c’était la gestion du Commissaire de police lui-même qui était dans le viseur du syndicat. D’où le refus de Mario Nobin qui ne peut subir les critiques à son encontre. Une tentative de ce dernier de bâillonner ses propres hommes et de leur priver de leurs droits d’expression et de manifester, comme garantis par la Constitution.

Cependant, Mario Nobin a dû céder devant la ténacité de Jaylall Boojhawon, président de la POSU, qui a saisi la justice pour contester sa décision. Appelé devant un juge en chambre le 27 novembre 2018 pour s’expliquer sur son refus, le CP s’est finalement rétracté pour autoriser la marche. Une claque, quoi !

Vol de litchis chez le CP

Suspect arrêté et condamné le même jour !

L’affaire a pris tout le monde de court et fait toujours l’objet de commentaires que ce soit dans les couloirs des Casernes centrales, de l’hôtel du gouvernement ou dans les rues. Pour avoir volé 200 litchis dans la cour du CP le 2 décembre 2016, un habitant de Ste. Catherine a été envoyé en tôle quelques heures à peine après que le vol ait été commis. Il a d’ailleurs été condamné à six mois de prison … le même jour du vol et de son arrestation ! Si bien que des avocats ont même qualifié ce cas de « jamais vu ».

L’histoire concernant ce vol de litchis aurait pu nous faire rire, sauf qu’il démontre à quel point notre police et justice fonctionnent à deux vitesses, surtout quand il concerne le Commissaire de police !