Après les inondations…

La colère des sinistrés face aux fonctionnaires tatillons

  • Le ministre Sinatambou : « Plusieurs sinistrés dans l’irrégularité »
  • Les sinistrés « Nou pa pou bouzé tant ki nou pa gagne nou kass ! »
  • Interventions musclées de la police

Victimes des récentes inondations, des nombreux sinistrés ont bruyamment manifesté leur colère à divers endroits la semaine écoulée. Ce 26 avril, à la sortie du Conseil des ministres, le ministre Étienne Sinatambou se montre intraitable. Il a notamment déclaré que « les autorités doivent agir pour ramener l’ordre ». Il a mis l’emphase sur des « sinistrés inéligibles » qui obstruent la route et qui causent du désordre. De leur côté, les sinistrés nous confient que les fonctionnaires de la Sécu leur font subir plusieurs misères.

Selon le ministre de l’Environnement et de la Sécurité sociale, à ce jour plus de Rs 35 millions ont été déboursées pour venir en aide aux sinistrés. Il a mentionné que que plusieurs cas d’irrégularités ont été décelés par le département de la Sécurité sociale et que ces personnes ne sont pas éligibles à une compensation.  « Nou pa kapav paye li kan li illégal », a-t-il fait ressortir. Il a aussi expliqué qu’il y a certains règlements selon le protocole en vigueur avant que ceux qui sont éligibles puissent recevoir leur allocation.

Autre son de cloche des sinistrés, qui nous affirment qu’ils en ont plus que marre de l’attitude tatillone des fonctionnaires qui leur font patienter pendant des heures sous un soleil de plomb avant de leur dire que la caisse est vide ou encore de leur expliquer que leur dossier est introuvable. D’autres explquent qu’ils font face à de la « discrimination » en raison de leur communauté, vu que certaines personnes, dont ceux habitant des maisons à étage, ont déjà touché leur compensation.

Une situation tendue à Port-louis

De nombreux sinistrés s’agglutinaient depuis lundi 22 avril devant le bureau de la Sécurité sociale à Astor Court.

Environ un millier de personnes, venues de régions avoisinantes telles que de Tranquebar, Cassis, Bain-des-Dames et Cité-La-Cure, s’était présentés devant l’Astor Court en vue de toucher leur allocation. Plusieurs mères de famille avec des bébés au bras ou des personnes souffrantes en fauteuil roulant faisaient la queue sous une chaleur insoutenable.

Les démarches administratives et les formalités provoquent des grincements entre les sinistrés et les officiers de la sécurité sociale.  « Depi plis ki deux semaines nou pe atan. Pankor paye nou ! Lapolis pe dir nou ale sekirite social, kan vin isi pe dir nou bizin fer enkor lezot formalite, be bizin atan », fulmine Rachelle, une habitante de Tranquebar.

Certains exprimaient leur révolte en disant que les officiers de la Sécu trouvaient des prétextes en expliquant que leurs dossiers étaient introuvables.  « Kuma kapav pena dossier ? Bizin re amène papier. Tousa letemps la, kuma zot ti pe fer ? », s’insurgent-ils.

 

Face à cette situation, les éléments la Special Supporting Unit (SSU) ont dû être déployés pour ramener à l’ordre les esprits surchauffés. « Zot ine met lapolis ek zot matrak isi. Kuma dir pe traite nou kuma ban zanimo. Ress zis pou pran ene fouette, apré fret nou », lachaient plusieurs sinistrés.

 

L’utilisation du gaz lacrymogène par un policier sème la panique à Terre Rouge

Le mardi 23 avril, au bureau de la sécurité sociale à Terre-Rouge, la situation s’est dégénérée après qu’un policier ait lancé une cartouche de gaz lacrymogène envers une foule de gens en colère qui essayait d’accéder à l’intérieur de l’établissement. Un nourrisson qui se trouvait dans les bras de sa mère a été sérieusement affecté. Le bébé et sa mère, ainsi que d’autre personnes, ont été conduits à l’hôpital. Il a fallu l’intervention du Deputy Commissioner of Police Lockdev Hoolash de la Northern Divison sur le terrain. Quant au policier, il a été renvoyé des lieux sous forte escorte policière. Selon les recoupements, une enquête a été initiée sur cet incident.

À Bain-des-Dames, les sinistrés dorment à la belle étoile

Une centaine de personnes, dont environ 25 enfants, ont passé deux nuits à la belle étoile devant le poste de police de Bain-des-Dames en guise de protestation contre le non-paiement de leur compensation. Ils dorment à même la rue avec des cartons posés au sol.

La Sécu : « Les procédures prennent du temps » 

Sollicitée pour une réaction, une source de la Sécurité sociale nous fait comprendre que les procédures prennent du temps et que les sinistrés rendent la tâche des officiers plus difficile. Il a également dit qu’il y a certaines procédures à suivre, en passant par la vérification des documents, celle des dégâts causées et le nombre de personnes affectées. Ces vérifications définissent l’éligibilité d’un sinistré à percevoir la compensation. Cette source nous explique aussi que, les officiers sont en train de traquer les ‘faux’ sinistrés.

Hors-texte

Une femme et un enfant en bas âge allèguent avoir été brutalisés par la SSU

Le jeudi 25 avril, toujours à Port-Louis, la tension était montée d’un cran vers les 17 h. Des dizaines de sinistrés s’agglutinent autour de l’Emmanuel Anquetil Building. Ils voulaient apparemment une rencontre avec le ministre Sinatambou pour lui faire part de leurs doléances. Un fort déploiement des éléments de la SSU s’approche d’un groupe des sinistrés. « Guette zotte pe bat sa femme ek so piti la ! », peut-on entendre crier du côté des sinistrés. Ces derniers finissent par évacuer le parvis de l’Emmanuel Anquetil Building, mais la tension va demeurer vive pendant plusieurs longues minutes. Les sinistrés se regroupent autour d’une femme et d’un enfant en bas âge. La femme affirme être enceinte et elle et l’enfant allèguent avoir été brutalisés par la SSU.

Les sinistrés nous confient qu’ils font la queue depuis le matin devant les locaux du ministère en vue d’obtenir leur compensation. Ne voyant toujours rien venir dans l’après-midi, ils ont réclamé des explications, mais il se sont alors heurté à la résistance des forces de l’ordre.