Amina Allybux : « Kan lapli tombé, lakaz coulé, pas capav dormi »

Extrême pauvreté

Nous sommes à la rue Alma, à Vallée-Pitot, là où l’asphalte se termine et commence un territoire montagneux. C’est à cette altitude, dans une petite maison, en feuilles de tôle rouillée par les intempéries et consolidée tant bien que mal par des poteaux en bois desséché, que vivent Amina Allybux (56 ans), et Raffick Allybux, son époux de 59 ans et leur fils de 16 ans, Sameer. Le quotidien n’est pas du tout facile pour cette famille, qui se débat pour sa survie, dans des conditions d’extrême pauvreté.

La famille Allybux habite dans ce taudis depuis plus de 30 ans maintenant et les jours vécus n’ont pas été tout rose pour eux. L’époux d’Amina, qui est invalide et ne peut travailler pour nourrir sa famille correctement, bénéficie d’une pension d’invalidité, qui ne suffit pas pour joindre les deux bouts. « Nous dépane lor mo missié so pension pou manger boire, paye la limière délo tout, li pas assez », nous confie Amina avec une tristesse dans le regard. C’est effectivement avec cette pension que cette famille se nourrit tant bien que mal. L’époux, malgré l’avis des médecins concernant son invalidité et son inaptitude à travailler, s’efforce de travailler chez un de leur proche afin d’arrondir avec difficulté les fins de mois. « Docter in dire mo missié pas travaille, mais nous péna choix, ki nous pou manzer sinon ? », nous dit-elle, assise sur le seul lit de la maison, un petit lit, composé d’une feuille de « plywood », recouverte d’une « natte » et d’une éponge déchirée en guise de matelas. C’est dans ce même lit que cette famille passe ses nuits, le regard fixant des fois le plafond, rempli de trous…

Leur maison, composée de deux pièces, où se retrouvent la chambre à coucher, la cuisine et aussi les toilettes et une salle de bain, toutes séparées par des feuilles de tôle, toutes trouées et rouillées. Tout démontre que les activités quotidiennes se déroulent entre ces deux pièces pour les Allybux, qui ont pris leur mal en patience dans ces conditions difficiles. Des activités qui sont souvent au ralenti par le manque d’eau courante et d’une bonne adhérence au réseau électrique. Si mauvais que les fils électriques dépassent de partout, signe de bricolage des habitants et de la négligence des autorités. Même les boîtiers de connexion électrique sont maintenant des « antiquités » et dans un état déplorable. Sans oublier les risques d’incendie en cas de court-circuit pendant les grosses pluies, ou les fils électriques qui dépassent peuvent facilement entrer en contact avec l’eau de pluie et par la suite augmente considérablement les risques d’électrocution et d’incendie.  « Mo lakaz coulé partou, kan lapli tombé, délo rentré, pas kapav dormi, bzin tire délo », nous dit-elle en larmes qu’elle n’a pu retenir vu le poids que cela pèse sur le cœur. C’est dans ces conditions extrêmes que vit cette petite famille, oubliée par la société et l’humanité.

Le fils d’Amina, Sameer, n’étant pas présent sur les lieux, nous avons voulu savoir un peu plus sur ses études et son quotidien vu qu’il n’a que 16 ans et c’est avec surprise que nous apprenons qu’il travaille déjà à son jeune âge. Amina nous confie que son fils travaille dans un « cold storage » tous les jours de huit heures à midi, et cela dans l’unique but de soulager ses parents en aidant à faire bouillir la marmite. C’est encore une fois en larmes qu’Amina, une mère souffrant pour son unique fils de 16 ans, qui n’a pas le choix que de travailler afin de pouvoir manger à leur faim. « Péna choix, li oblizé travail même so laz », nous dit-elle, avec le regard envahi de désespoir.

 

Un logement approprié

« Démarce lakaz nou ine faire dépi 2012, ziska ler pas nanier, pas tanne aucaine réponse », nous explique Amina concernant les démarches entamées à la National Empowerment Foundation, et cela il y a quatre longues années, en 2012. Elle avait fait une demande pour la construction d’un petit logement en béton afin de soulager leurs conditions de vie, mais jusqu’ici, ça a été la sourde oreille de la part des responsables. « Deux gros cyclones in fini pass lor nous, nous ine rési tini, mais si éna ène troisième mo per mo perdi mo lakaz sa foi là », nous dit-elle en pleurs. Elle fait un appel aux autorités concernées de l’aider afin d’avoir un meilleur logement afin d’atténuer quelque peu leur souffrance. Elle ajoute qu’elle reçoit des donations pendant le mois du Ramadan, mais ces derniers ne durent pas suffisamment longtemps et elle se retrouve très vite dans cette condition précaire. Elle fait aussi un appel aux ministres et députés concernés de la région de revoir sa situation afin de l’aider à avoir un logement adéquat.