Ajay Gunness: « Le gouvernment a peur d’une élection partielle »

« Le pays a plusieurs capitaines dans le bateau et le pays se dirige vers un naufrage »  

Le secrétaire général du MMM, Ajay Gunness, est d’avis que le gouvernement de L’Alliance Lepep serait en train de prôner une politique de deux poids deux mesures en ce qui concerne les affaires Dayal et Lutchmeenaraidoo. Selon lui, le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, aurait dû demander à ce dernier de démissionner.  Dans une interview accordée au Sunday Times, il laisse entendre que la « population finne sape dans caraille, finne tombe dans du feu ». Selon lui, il y a plusieurs capitaines dans le bateau, et le pays se dirige vers un naufrage. Ajay Gunness dira aussi qu’il est prêt à assumer n’importe quel poste à responsabilités au sein du MMM. Notre invité de la semaine soutient également que le réveil de la population sera brutal pour ceux qui ont trahi les Mauriciens.

Sanjay BIJLOLL

 

Q : Seriez-vous d’accord avec ceux qui disent que le MMM éprouve toutes les peines du monde pour redorer son blason surtout avec la défaite du tandem MMM-PTr aux dernières élections générales et le départ de plusieurs membres de votre parti, qui ont  préféré lancer le Mouvement Patriotique ?

R : Je ne suis pas d’accord avec ceux qui pensent ainsi. Notre défaite aux élections générales est derrière nous. Certes, après notre défaite, nous avons passé des moments difficiles pendant six mois, surtout lorsque la bande à Ganoo nous a trahis.

Et après les élections municipales en septembre 2015, la population a découvert le vrai visage du gouvernement. On a noté l’arrogance de certains ministres. Le gouvernement a prôné une politique de copinage et la protection de familles. La désillusion s’est vite installée. Aussi, après le jugement de Pravind Jugnauth, la situation politique se dégrade dans le pays.

Ainsi, la population a comme seul salut le MMM, parce que, d’un côté, il y a le PTr avec Navin Ramgoolam qui s’est complètement ‘dévalué’ avec tous les scandales qui pèsent sur lui. De l’autre côté avec la condamnation de Pravind Jugnauth, le MSM a perdu son sens de leadership.  Aujourd’hui, le pays se trouve dans un tournant que ce soit au niveau de l’économie, law & order, de la création d’emplois et  de l’insécurité. C’est là que le MMM fait toute la différence. On a un leadership fort, solide, expérimenté en la personne de Paul Bérenger. Nous avons une équipe, prête à relever les défis, nettoyer le pays et apporter le vrai changement avec un programme gouvernemental pour relancer les affaires du pays. L’avenir appartient au MMM. Dans les semaines et mois à venir, nous prouverons que l’année 2016 sera l’année du MMM.

 

Q : Dans une récente interview, accordée au Sunday Times, un de vos anciens collègues, Alan Ganoo, a déclaré que le plus grand défaut de Paul Bérenger est qu’il est communalo-castéiste. Quelle est votre réaction à ce sujet ?

R : De par les déclarations d’Alan Ganoo, je pense qu’il vieillit très mal. Quand il était au MMM, il avait occupé le poste du leader de l’Opposition. Il était le bras droit de Paul Bérenger. A ce moment-là, il n’avait jamais dit ou constaté que Paul Bérenger prônait une politique communalo-castéiste. Or, aujourd’hui, il est triste de voir que quelqu’un, qui était au MMM et qui se faisait élire sous la bannière du MMM et qui était l’‘agwa’du PTr-MMM, se sert des mêmes arguments que les adversaires traditionnels du MMM avaient l’habitude d’utiliser contre Paul Bérenger.

Le départ d’Alan Ganoo a donné une bouffée d’air frais au MMM en laissant la place aux jeunes cadres du MMM qui misent sur la politique de ‘ene sel lepep  ene sel nation’.

Alan Ganoo doit s’occuper de son ‘Mouvement Pathétique’ et voir autour de lui qui sont ceux qui mènent campagne contre lui. Pour moi, son parti et lui ne vont jamais décoller.

 

Q : Ajay Gunness, les “affaires” qui secouent actuellement le gouvernement de l’Alliance Lepep semblent être du pain béni pour l’Opposition à la veille de la rentrée parlementaire. Dans quel état d’esprit le MMM va-t-il aborder cette rentrée ?

R : Bien avant l’affaire Lutchmeenaraidoo et Dayal, le gouvernement se trouvait dans une situation difficile car pendant une année, la population en a vu de toutes les couleurs. « Comme-ci population finne sape dans caraille finne tombe dans du feu ». Il y a plusieurs capitaines dans le bateau, qui se dirige vers un naufrage. On prône une politique de ‘nation jougadère’ dans le pays quand on constate que Vishnu Lutchmeenaraidoo spécule sur l’or et qu’on a fini par convertir le centre de conférence de Grand-Baie en un casino.

Soodhun fait ce qu’il veut, Lutchmeenaraidoo faisait ce qu’il voulait, Bhadain tire de son côté comme un beau diable et Dayal se servait d’un  hélicoptère pour se rendre compte des inondations qui avaient entraîné beaucoup de dégâts.

Le gouvernement est composé d’une bande de fous. A la veille de la rentrée parlementaire, un ministre est forcé de ‘step down’. Dans le cas de Lutchmeenaraidoo, il est clair que le gouvernement a peur d’une élection partielle au no 7.

Nous, au MMM, sommes prêts à faire feu de tout bois lorsque les travaux parlementaires reprendront leurs droits.

 

Q : La rumeur veut que d’autres ministres seraient impliqués dans d’autres « affaires ». En savez-vous quelque chose ?

R : C’est une bande d’affamés  qui n’était pas prête à diriger le pays et s’occuper des affaires du pays. Ils ont gagné le pouvoir par pur accident. Ils ont fait semblant de nettoyer le pays, mais ‘en bas en bas’, ils font pire que Navin Ramgoolam dans certains cas.

Je suis sûr que le ministre de la Bonne gouvernance, Roshi Bhadain, doit mieux savoir plus que les autres l’implication des autres ministres dans d’autres affaires qui pourraient encore secouer le pays. Il doit agir selon le dicton « ICAC pas guette figure » et prendre les actions nécessaires qui s’imposent.

Ce gouvernement est comme un panier de crabes. Un bon ‘karcher’ ne suffira pas  pour nettoyer le pays et la bande de ‘ramassi united’.

 

Q : Dans le ‘cas’ Lutchmeenaraidoo, qu’auriez-vous fait à la place du Premier ministre ?

R : La population a le droit de savoir pourquoi le gouvernement prône-t-il une politique de deux poids, deux mesures. Dans le cas de Dayal qui a choqué le pays et avec raison, le PM, lui a demandé de ‘step down’. Mais pourquoi dans le cas de Lutchmeenaraidoo, dont trois dossiers ont atterri sur la table de l’ICAC dont le premier concernait Li Hi, le 2e – le prêt de Rs 44 m et le 3e –  contrat alloué par la State Informatics Ltd  à la compagnie de son fils (Infozen), le PM n’a pas demandé à l’ancien ministre des Finances de ‘step down’ ?  Vishnu Lutchmeenaraidoo sait qui est derrière le ‘leakage’. Je crois qu’il  aurait dû soumettre sa démission.

 

Q : Ajay Gunness, vous et Pradeep Jeeha, êtes virtuellement opposés pour prendre le leadership du MMM aux prochaines législatives. Je dis bien ‘virtuellement’. Serait-ce la raison pour laquelle Paul Bérenger s’est choisi d’être Premier ministre dans un éventuel gouvernement MMM ?

R : Ce que vous dites n’est pas vrai. C’est la presse qui a alimenté tout cela. Après la défaite de 2014, Paul Bérenger a lui-même remis son leadership sur le tapis. Le Bureau politique du MMM a, à l’unanimité,  demandé à Paul Bérenger de continuer de garder le leadership du MMM. Par la suite, le Comité central de notre parti l’a approuvé.

Pradeep Jeeha et moi, nous ne sommes nullement opposés pour prendre le leadership du MMM. Tous les membres du MMM considèrent que le pays a besoin d’une personne de la trempe de Paul Bérenger avec tout son sérieux, son sens de leadership et qui a les mains propres et qui n’a aucun scandale qui pèse sur lui, pour prendre les commandes du pays.

Pradeep Jeeha et moi, nous allons certainement faire partie de l’équipe autour du leadership et primeministership de Paul Bérenger afin d’emmener le vrai changement dans le pays. Nous voulons léguer un bon héritage aux  jeunes afin qu’ils n’aient aucune crainte de l’avenir.

 

Q : Etes-vous d’accord avec ceux qui disent qu’une grande frange de la population n’accepterait jamais Paul Bérenger comme Premier ministre ?

R : Evidemment non. En 2010, le MMM avec Paul Bérenger comme leader, a fait face à l’alliance PTr-MSM. Il ne nous manquait que 2% de votes pour faire basculer les résultats en notre faveur.

Le MSM porte une grande responsabilité pour faire Navin Ramgoolam rester en poste et aussi pour les dégâts que ce dernier a faits avec la complicité du MSM.

D’un côté, la population a témoigné des frasques de Navin Ramgoolam et de l’autre les agissements des Jugnauth. La population n’a d’autre choix que de soutenir Paul Bérenger et le MMM aux prochaines élections générales.

 

Q : Sentez-vous capable d’assumer le poste du leadership après Paul Bérenger ?

R : Il ne faut pas personnaliser les débats après Paul Bérenger. Permettez-moi de vous dire que Paul Bérenger va être là pour plusieurs années encore. Le MMM et le pays ont besoin de lui. Le moment venu, le parti va décider. D’autres personnes et moi sommes capables de prendre le leadership du parti.

En tant que bon serviteur du peuple, je suis prêt à assumer n’importe quel poste à responsabilités au niveau de mon parti.

 

Q : Malgré le mécontentement ambiant qui prévaut dans le pays, la population semble être marquée par une certaine apathie. Pourquoi ?

R : Les Mauriciens sont de nature réservée. Il y a une certaine apathie parce que la population, qui a voté massivement pour le gouvernement, se sent trahie par le gouvernement, qui commet la même chose que l’ancien régime en termes de fraude, corruption,  scandales, politique des petits copains et d’arrogance.

Pendant la campagne électorale, l’Alliance Lepep avait promis  beaucoup de bonnes choses pour le peuple. Et le tandem SAJ-Vishnu avait promis le deuxième miracle économique et que le gouvernement va nettoyer le pays. Or, les Mauriciens sont déçus. Le réveil de la population sera brutal pour ceux qui ont trahi les Mauriciens.

 

Q : Le Premier ministre dont on disait absent dans la prise des grandes décisions, semble avoir la main haute tant dans l’affaire Lutchmeenaraidoo que dans celle de Dayal. Votre opinion ?

R : Allons dire franchement que le Premier ministre est un ‘part time Prime Minister’. Il n’est plus le Rambo de 83. Aujourd’hui, tout le monde sent que le PM a abdiqué devant ses responsabilités.  L’histoire va le juger comment il tolère une situation où trois dossiers se trouvent à l’ICAC, dont un était envoyé à la commission lorsque Vishnu Lutchmenaraidoo était encore ministre.

Je crois que sir Anerood Jugnauth ‘has to wake up’. Il a pris sous son contrôle les finances, l’ICT et la MBC surtout au moment où l’économie n’arrive pas à décoller. Qu’est-ce qui va arriver à ce beau pays ? « Cry my beloved country ».

 

Q : En quoi la demande de SAJ à Dayal de ‘step down’ peut-elle déstabiliser le gouvernement ?

R : Le gouvernement est déstabilisé, pas seulement avec les affaires Dayal et Lutchmeenaraidoo. Quand on avait présenté la loi Bhadain, on avait constaté l’attitude de certains députés y compris Rughoobur, Fowdar et Jehangeer. Or, récemment, Fowdar a dit ce qu’il fallait dire et il ne sait même pas où il va s’asseoir à l’Assemblée nationale.

L’actuel gouvernement, qui est disloqué, est comme une vieille voiture qui n’est pas capable d’arriver à destination. Elle nous a quitté au beau milieu de la route avec toutes nos souffrances.