A 63 ans, Hemawantee vit à la belle étoile

À Dagotière

Sa vie a dramatiquement basculé il y a un mois.  Alors qu’elle habitait avec son fils une maison de la NHDC à Upper Dagotière, cette retraitée âgée de 63 ans, se retrouve aujourd’hui à vivre dans des conditions inhumaines.  Son fils, atteint d’une grave maladie de la peau, a dû trouver refuge chez une de ses sœurs à Sébastopol.  Hemawantee ne sait quoi faire et sa condition ne semble pas s’améliorer.

Marwan Dawood/ Photos: – Sheikh Qalam

Choquante et révoltante! Ce sont les mots que nous pouvons utiliser pour décrire la situation dans laquelle se trouve Hemawantee Poorun, cette retraitée de 63 ans.  Depuis maintenant un mois, cette pauvre dame vit dans des conditions pouvant mettre sa vie en danger.  En effet cette dame n’a plus de maison depuis que les autorités ont décidé de la mettre à la porte de sa petite demeure, faute de paiements.

 

Un mois d’août cauchemardesque

Son  calvaire a commencé le 8 août quand des officiers et des techniciens de la CWA l’ont privée de sa fourniture d’eau sans l’informer.   Une semaine plus tard, soit le 15 août, des policiers sont venus chez elle pour l’informer qu’elle doit évacuer les lieux car elle n’a plus le droit d’y habiter.  Elle recevra enfin  la visite des  officiers de la Mauritius Housing Company Ltd et de la police, le 24 du même mois.  Et ce sera la visite de trop.

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C ‘est dans cet espace et sur ce lit improvisé que dort Hemawantee

Traitement affreux

Hemawantee vivait avec son fils Doomunsingh qui, lui, souffre de Psoriasis depuis sa tendre enfance.  Le 24 août dernier lorsque les officiers sont arrivés chez elle, Hemawantee savait que sa vie allait basculer.  La dame qui retient difficilement ses larmes se met alors à nous raconter le traitement subi par son fils et elle.  «Kan zot ine vini zot pane donne aucaine explications. Zot ine rentré zot ine dévalise mo lakaze complètement.  Zot ine prend tout mo linze, mo bane manzé, mo bane récipients zot ine zett dan la cour par derrière. » La dame continue difficilement son récit, car elle a du mal à retenir ses larmes.  Elle fait une pause et reprend son récit, mais perd une nouvelle fois ses moyens.

«Zot ine fini casse tou mo banne zafer. Mo lili mo l’armoire tou ine casser. Mo matelas zot ine prend sa zot ine zett sa coumsa même. Mo sofa, ène sel mo ti éna, sa dan coin lakaze ».

Pendant qu’elle cherchait les photos de son fils, qui n’était pas présent lors de notre visite à Dagotière,  nous avons eu l’occasion de faire le tour de la maison d’Hemawantee et les images que nous avons retenues nous restent gravées dans la mémoire.

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Une photo de Doomunsingh, montrant la gravité de sa maladie

«Mone dormi emba camion » 

Mais comment est-ce que cette dame passe-t-elle ses jours et nuits ? Hemawantee n’a aucun endroit où aller chercher refuge.  Elle s’est alors installée dans un petit refuge de fortune qu’elle a-elle-même aménagé sous la varangue de sa maison. Une éponge mince et salle, recouverte d’un drap bleu, quelques piles de vêtements qu’elle utilise comme oreiller,  le tout caché par une porte de réfrigérateur.  Hemawantee vit donc les pires moments de sa vie. «Mo bizin dormi coumsa tous les jours, mo péna lott place pou mo allé. Premier zour mone dormi cot fencing, après mone dormi emba camion lor simé.  Mo péna personne pou ramasse moi. Mo tifi déjà pé garde mo garçon cot li. Li aussi li pas vivre aisé. So missié déjà pas content mo garçon surtout kan so la peau tombé. »

Hemawantee peut jusqu’à maintenant compter sur le soutien de quelques voisins qui lui offrent de la nourriture et lui accordent l’hospitalité de leur maison pour l’usage des toilettes et de la salle de bain, mais jusqu’à quand  se demande la dame. «Mo bizin alle tapp le porte voisin pou dimande zot laisse mo servi toilettes. Zot ine commance plein ek moi. Mo pou népli éna aucaine place. Zot mem pé donn moi ène tigit manzé mais ziska kan mo pou vive coumsa ? »

 

Ses démarches n’ont pas abouti

Si elle est arrivée jusque-là, Hemawantee dit avoir beaucoup lutté.  « Zamais mo pane refuse payer. Mone lutté, mone dire zot ki mo ène veuve.  Ine gagne 19 ans dépi mo missié ine mort, mo garçon pas capave travail. Mo péna travail. Mone ale fer démarche plusieurs fois, mone dire zot ki mo prêt pou paye zot ène ti l’arzen parce qui mo péna. Zamais mo pane refuse payé.  Mone dire zot mo pou paye Rs 1 500, zot dire moi non. Mone dire mo pou paye Rs 2 000 zot ine dire moi non. Mone dire zot coupe mo pension nett Rs 5 000 zot pane lé zot dire moi madame pas pou capave faire nanier. »  Les peines d’Hemawantee ne s’arrêtent pas là.  La dame nous révèle qu’à chaque fois qu’elle se rend au bureau de la MHC, elle se fait «maltraiter ».  Elle se met à pleurer…  « Mo allé mo ale fer mo bane démarches mais sak fois zot maltraite moi.  Ena bane madames là-bas zot passe bane commentaires desobliogeants contre moi.  Kan directeur là aussi vini, li pousse moi. Li amene moi dan ene bureau après li dire banela fer li alé, fer li alé. »

Hemawantee a aussi envoyé deux lettres, la première à la présidente de la République et la seconde au ministre du Logement Showkutally Soodhun, mais personne n’a semblé bon de lui répondre ou de s’enquérir de sa situation.

 

Son état de santé commence à être affecté

Passer les jours les plus rudes de l’hiver couchée sur une éponge et recouverte d’un drap fin, ce n’est pas évident surtout pour une sexagénaire. Pourtant c’est ainsi qu’Hemawantee passe ses nuits. Samedi matin, nous l’avons appelée pour prendre de ses nouvelles et c’est avec beaucoup de peine qu’Hemawantee nous a parlé. Elle a des douleurs atroces le long du corps et elle perd graduellement sa voix.
A voir la vidéo de notre rencontre avec Hemawantee sur notre site web et sur notre page Facebook, www.facebook.com/sundaytimes.official, dès aujourd’hui.